Un bref retour sur la Conférence de Frédéric Dardel
Publié par Marion Guillaumin, le 23 janvier 2016 4.4k
Mercredi 20 janvier, Frédéric Dardel, biologiste moléculaire et Président de l’Université Paris Descartes, est venu à la rencontre des Grenoblois en leur offrant une conférence sur la révolution génomique.
Cet événement, organisé au Canopé de l’Académie de Grenoble, est le premier dans le cadre du cycle de conférences annuel de « La Culture Partagée », programme né d’un partenariat avec les Amis du Muséum, l'Association des Professeurs de Biologie et Géologie (APBG), la Direction académique aux arts et à la culture (DAAC) et le Muséum. D’ailleurs, chacun de ces partenaires est présenté et la conférence est annoncée comme introduction de l’exposition "Monstru’eux vous trouvez ça normal "qui se déroulera tout au long de l’année 2016 au Muséum et à La Casemate.
Après une brève biographie de Frédéric Dardel, la salle remplie d’enseignants, de chercheurs, d’étudiants et d’autres curieux, se plonge dans un silence respectueux pour lui consacrer son attention.
Afin d’adapter son discours au public qui s’avère varié, il veut nous raconter une histoire. Mais pas n’importe laquelle. L’histoire de la génomique : une véritable course scientifique, technique et économique.
Il entre dans le vif du sujet en rappelant l’annonce du New York Times le 26 juin 2000 de l’établissement de la première carte du génome humain. Annonce majeure, conséquence d’une série de péripéties qu’il va nous conter.
Frédéric Dardel prend soin de (re)définir le génome à l’ensemble de son auditoire et justifie la complexité de l’information à laquelle on accède de manière invisible. Il commence alors sa conférence en l’organisant telle une frise chronologique. Il est impossible d’en perdre une miette.
A travers la découverte des bactériophages par Félix d’Hérelle en 1917, l’ADN synthétisé en 1967, les prix Nobel de Sanger pour sa méthode de séquençage établie en 1977, Frédéric Dardel nous présente la Recherche en génomique dans le contexte de l’époque, nécessitant de plus en plus d’outils techniques, notamment informatiques. Il mentionne évidemment l’importance des enjeux économiques liés à ces recherches. D’ailleurs, il nous présente « les 3 mousquetaires » partant à la quête du séquençage du génome humain en 1985 pour 3 milliards de dollars : Renato Dulbecco, Robert Sinsheimer et Charles DeLisi. C’est là que le conférencier nous expose que ce projet de génome humain de grande ampleur né d’une coopération scientifique internationale s'est étalé sur près de quinze ans et a donné lieu à une compétition acharnée entre le consortium public international et une société privée, Celera Genomics dirigée par Craig Venter.
Frédéric Dardel se lance alors dans un discours nourri d’anecdotes, dosé d’une pointe d’humour, tout en laissant l’auditoire en pleine réflexion. Il précise souvent « comme je le dis à mes étudiants.. » ce qui transpose le public et « simplifie » parfois la compréhension de certaines informations. Le conférencier s’amuse en exposant au public les différents personnages clés de cette Recherche en génomique, cette « bataille » de celui qui parviendra en premier à séquencer le génome humain entièrement, induisant alors une évolution phénoménale de la technologie. Ce n’est pas un simple cours d’Histoire de Science mais un récit riche et animé d’une série de faits historiques.
Il appuie toujours ses propos en rappelant le besoin de l’amélioration des techniques ainsi que les dates clés de cette révolution : notamment la première machine de séquençage automatique en 1990, l’information génomique complète d’un organisme vivant (bactérie pathogène Haemophilus influenzae) faisant la Une du journal Science le 28 juillet 1995, le séquençage du génome de la drosophile en 1999, et puis la fameuse annonce du 26 juin 2000 par Bill Clinton et Tony Blair.
Il achève ses deux heures de conférence ponctuée de rires dans l’assistance et d’étonnements face au dévoilement de certaines petites anecdotes, en présentant les génomes aujourd’hui complètement séquencés (ceux du blé, du maïs, de la souris ou d'espèces vivant en conditions extrêmes telles que les tardigrades) et la fonctionnalité du génome. Attaché à l’évolution, Dardel précise que l’on peut attribuer une fonction biologique à un segment d'ADN si et seulement s’il est possible de la détruire (mutation). De ce fait, seulement 3 à 10 % du génome seraient constitués de gènes fonctionnels. Les 97 à 90% restants sont encore un mystère.
Après un applaudissement faisant preuve de l’intérêt du public admiratif, Frédéric Dardel est acclamé par l’équipe de l’organisation de la conférence et les mains ne font que se lever pour poser quelques questions. Durant près d’une demi-heure, l’auditoire félicite le conférencier pour son discours et lui demande parfois d’expliciter un propos, de préciser une notion ou bien s’interroge sur les questions éthiques que ce domaine de Recherche peut amener.
En bref : un moment agréable, des explications claires et précises, permettant de considérer les intérêts de cette discipline et de prendre connaissance des événements historiques qui lui ont permis de vivre une véritable révolution. Un membre du public a même demandé à ce qu’il revienne !