Rites et Technologies au salon Experimenta 2018
Publié par Marguerite Pometko, le 11 février 2018 2.7k
Le vendredi 9 février, un joli panel d’artistes et de chercheurs se sont rassemblés au salon Experimenta pour échanger autour de la thématique « Corps, Rites et Technologies ».
Quels liens entre le corps et les nouvelles technologies ? Comment se réinventent les rites ancestraux à l’aune des technologies digitales ? Comment les technologies participent à la création de nouveaux rituels et de nouvelles mythologies ? … Autant de questions qui ont été abordées lors de cette conférence animée par Maxence Grugier, journaliste spécialisé en arts numériques. Mais d'abord, les intervenants nous ont accueilli avec un petit rituel de danse avant d'entamer la conférence !
Alors on saute ! #XPA18 pic.twitter.com/Ccr6ZptKO0
— Atelier ArtsSciences (@AtelierArtSci) 9 février 2018
Technologie
et néo-tribalisme
L’Homme a toujours
créé des rites pour marquer les étapes importantes de sa vie et
réenchanter son quotidien. Les rites ancestraux n’ont pas disparu
avec l’avènement de la société industrielle, bien au contraire. Nicolas Ticot est artiste numérique au sein du XLRProject. Pour lui, le meilleur exemple
récent du tribalisme moderne sont les rave parties.
Avant les Hommes préhistoriques se rassemblaient dans les grottes pour danser autour d’un feu. Dans les années 90-2000, les jeunes se rassemblent dans des caves ou dans la forêt pour danser. La musique électronique faite par des machines et les substances chimiques créent un nouveau mode de communication entre ces jeunes. Je vois là un retour aux rites ancestraux du passé, une recherche de transcendance collective par la dance.
Les
rites se définissent communément comme des coutumes ou cérémonies répétées invariablement dans le temps, portées par la tradition.
Ce qui est anecdotique, c’est que nous tentons de maintenir ces
rites dans nos usages numériques.
Digital Vaudou : des rites millénaires rencontrent la technologie
Des technologies
comme la réalité virtuelle offrent de nouvelles façons de vivre sa
spiritualité. Nicolas Ticot a effectué
plusieurs voyages en Afrique, où il a découvert les traditions
vaudou d’Afrique de l’Ouest. Ensemble avec le danseur Vincent
Harisdo, il crée un spectacle mêlant réalité virtuelle et rituel
Vaudou. Une expérience intense et transcendante que les visiteurs du
salon ont pu expérimenter au stand "Digital Vaudou".
"Digital Vaudou" fait entrer la culture vaudou dans le monde contemporain à travers une expérience #VR très intense #XPA18 pic.twitter.com/foGqgB5szn
— Atelier ArtsSciences (@AtelierArtSci) 9 février 2018
Le
caractère « magique » des technologies
Les outils numériques, de part leur perfection supposée, apportent une part de magie à notre quotidien. Pour reprendre la citation de l’auteur de science-fiction A. C. Clarke :
"Toute #technologie suffisamment avancée est indiscernable de la magie" À.C.Clarke / Rites & Technologie #XPA18 @AtelierArtSci @hexagone_meylan
— Marguerite Pometko (@Marguerite_Pom) 9 février 2018
D'autant plus que la complexité des objets numériques n’a cessé d’augmenter. Bien qu’ils soient utilisés au quotidien par des milliers de personnes, seule une poignée dispose de la culture technique pour en saisir le fonctionnement. Les stratégies de marchandisation rendent les objets plus fermés et moins réparables. Cette opacité est source de frustration et de croyances magiques.
Philippe Somnolet
est anthropologue et s’intéresse aux nouvelles superstitions
autour de la technologie. Selon lui, le fait de ne pas avoir accès
aux mécanismes des technologies crée beaucoup d’imaginaire. Lors
de la colonisation, cela a donné lieu à des situations
surréalistes (de notre point de vue), où les technologies des colons étaient assimilées à
de nouvelles divinités par les autochtones.
Mais les exemples plus
contemporains ne manquent pas : cérémonie de bénédiction des
ordinateurs portables dans les Églises, mystérieuse
vague de suicide autour du jeu Pokémon au Japon, numéros de
téléphone sataniques au Nigeria, forums où l’on discute de la
supposée conscience des portes automatiques...
Technologie et rapport aux corps
Cette
conférence fut aussi l’occasion d’explorer les relations
toujours plus intimes qui se tissent entre notre corps et les
technologies. Philippe Somnolet nous parle de cette drôle de danse
que nous effectuons en tournant en rond lorsque nous téléphonons
dans un espace public. Vous vous reconnaissez peut-être ? ;)
La pensée magique dans la #technologie : "souffler dans les cartouches, errer quand on est au téléphone, mettre le doigt en l'air pour avoir plus de réseau..." #XPA18 pic.twitter.com/QUFte1mtFC
— Atelier ArtsSciences (@AtelierArtSci) 9 février 2018
La chorégraphe
Rocio Berenguer s’intéresse quant à elle à tous ces « tics
mécaniques » que nous intériorisons inconsciemment dans nos
usages numériques. Dans son spectacle Homeostasis, elle nous livre
le récit d’une femme qui se re-programme afin d’atteindre une
version améliorée d’elle-même.
Il y a une beauté dans la précision du corps qui essaie d’imiter la machine. Mais c’est le bug qui crée l’espace poétique et humain.
La quête du corps
parfait dans la « ville intelligente » se poursuit. Reste
à savoir si la machine va s’adapter à l’Homme ou l’Homme à
la machine...