Aurores polaires : pourquoi la polarisation ?
Publié par Mathieu Barthelemy, le 10 mars 2016 2.6k
Ce soir, le ciel est clair. Et vers 20h30, nous avons vu sans doute la dernière aurore de cette campagne. Le ciel s'est embrasé. Nous avons vraiment de la chance pour notre dernier soir ! L'arc - ou les arcs - sont somptueux, dynamiques. Un seul regret : Premier Cru n'est plus là pour enregistrer ces données. Mais SPP vise dans l'arc à l'Est, azimuth 80°.
@LadyLunisis @Barthelemy_Mat Wow, j'ai raté un fameux spectacle hier soir !! :( pic.twitter.com/7tdQ70C45V
— Hervé Lamy (@Lams9999) 10 Mars 2016
La journée avait durement commencé. Réveil 6h30 pour conduire Jennifer, Anne-Marie, Hervé et Jean à l'aéroport de Tromsø. Nous nous étions couchés vers 3h30-4h, après avoir rangé Premier Cru dans la camionnette. Les têtes étaient marquées... et le filtre à café mal mis dans la cafetière. Résultat : un café imbuvable !!!
Bye Skibotn. Hello Oslo pic.twitter.com/ClfIAIvX3j
— Hervé Lamy (@Lams9999) 9 Mars 2016
Après les avoir déposés à l'aéroport, pris un vrai café ensemble et fait des projets pour la suite à Grenoble, Anne et moi sommes rentrés à Skibotn. Le temps est au soleil ; nous poussons jusqu'au Galggogobba. Magnifique ! On se rêve sur des skis. Puis sieste et aurore...
Pour alimenter votre curiosité, je vais maintenant vous expliquer pourquoi nous passons notre temps à étudier la polarisation des aurores.
Les aurores polaires [appelée aurores boréales dans l'hémisphère nord et aurores australes dans l'hémisphère sud, ndlr] sont des phénomènes lumineux provoqués par l'interaction entre les particules chargées du vent solaire et la haute atmosphère. Les aurores se produisent entre 100 et 300 km d'altitude : une région difficile d’accès. Trop haute pour les ballons (qui atteignent au maximum 50 km), trop basse pour les satellites (la Station spatiale internationale - ISS - est par exemple à 450 km). Il s'agit pourtant de la zone à laquelle la plupart des particules se déposent et il nous faut des informations sur ce qu'il s'y passe.
Les aurores sont donc une sorte de thermomètre de cette région que nous pouvons voir à distance, ce qui est pratique lorsque l'on ne peut pas s'y trouver. Cependant, le rouge et le vert [les couleurs dues à l'excitation des molécules d'oxygène, ndlr] ne suffisent pas. Notre "quête quichottienne" est donc de trouver de nouvelles sources d'information.
J'ai un nouveau jouet! #MesurezLesToutes pic.twitter.com/wjKkEG5027
— Anne V. (@LadyLunisis) 9 Mars 2016
Or, la polarisation est une information contenue dans la lumière qui est souvent négligée. Elle est le traceur des "processus anisotropes", c'est-à-dire de processus qui ont une direction préférentielle. En effet, les particules créant les aurores sont conduites par le champ magnétique terrestre. Elles forment une spirale autour des lignes du champ. Il y a donc une anisotropie.
Notre raisonnement a été de dire que s'il y a anisotropie, il doit y avoir polarisation [à ce sujet, lire notamment ce communiqué de presse datant de 2008, sur la première observation de la polarisation de la lumière dans l'atmosphère boréale, ndlr]. Et cette polarisation nous fournit des informations supplémentaires sur le vent solaire, la composition atmosphérique ou la configuration du champ magnétique. Voilà pourquoi nous délocalisons notre bureau dans ces terres nordiques environ une fois par an.
>> Crédits : Anne Vialatte (voir ses photos d'aurores boréales sur Flickr), capture d'écran de la caméra plein-ciel, Université de Tromsø