Pasteur vs Koch : Quand rivalités scientifiques font avancer la science.

Publié par Clara Perissat, le 26 mai 2020   8k

A gauche : Robert Koch, à droite : Louis Pasteur. Source : Listverse 

Depuis toujours, les humains sont touchés par des maladies infectieuses transmises par des microbes : bactéries, virus ou autres micro-organismes. De grands scientifiques se sont lancés en quête de trouver la cause de ces maladies afin de leur trouver un remède. C’est notamment le cas de Pasteur et Koch, qui se sont affrontés pendant toute la fin du 19ème siècle, dans un duel scientifique qui a permis de faire avancer la science.

La maladie du charbon ou le premier affrontement des deux hommes.

  À la fin du 19ème siècle, Louis Pasteur et Robert Koch sont deux personnages très différents. L’un est un chimiste français célèbre pour ses travaux sur les micro-organismes (fermentation des alcools, pasteurisation), et l’autre est un médecin de campagne allemand, étudiant les microbes dans son laboratoire de fortune. Et c’est pourtant ce médecin inconnu qui va prouver, en premier, la théorie de Pasteur : les maladies, comme la fermentation, sont causées par les micro-organismes. Ainsi, en 1872, Robert Koch observe des bacilles, microbes en forme de bâtonnets, dans du sang de moutons malades. Il cultive alors ces bacilles dans du liquide d’œil de bœuf, un milieu stérile propice à la culture de micro-organismes, et injecte sa culture dans un lapin. Ce dernier tombe malade et meurt, prouvant ainsi que la maladie du charbon, décimant à l’époque des troupeaux de moutons, se transmet par les microbes. 

Pasteur, vexé d’avoir été devancé par un « simple médecin », et surtout un allemand -la France a perdu la guerre face à l’empire allemand en 1870-, abandonne ses travaux sur la bière pour se consacrer à l’étude des micro-organismes dans les maladies.

En 1881, Louis Pasteur réalise lors d’une démonstration public, une campagne de vaccination de moutons contre la maladie du charbon. Il utilise pour cela, des cultures de microbes rendues moins virulentes en restant à l’air libre. Le système immunitaire du mouton, en présence de ces microbes peu virulents, apprend à se défendre contre eux, évitant ainsi la maladie. Pasteur donne ainsi, grâce à la notion de microbe, un sens à la vaccination, déjà utilisée à l’époque. Cette vaccination est une réussite, Pasteur est reconnu par le grand public et invité au congrès de médecine de Londres où il fera un discours évoquant à peine les travaux de Koch. Cet évènement renforce la compétition entre les deux hommes.

Des affrontements sur un nouveau front : les maladies humaines.

  Robert Koch est désormais conseiller du gouvernement dans un laboratoire de bactériologie à Berlin. Il met au point des innovations importantes à l’aide de collaborateurs, comme la culture de micro-organismes sur milieu solide, utilisant ainsi les boites de pétri et l’agar toujours utilisés à l’heure actuelle. Mais ces avancées ne lui suffisent pas, il s’attaque alors à la tuberculose, une des maladies les plus meurtrières de l’époque. En 7 mois à peine, il découvre la bactérie à l’origine de cette épidémie : le bacille de Koch.

Vue au microscope du bacille de Koch, responsable de la tuberculose. - Source : bfmtv.com

Cette découverte lui vaut alors une renommée internationale et une invitation au congrès de médecine de Genève, où il sera fortement humilié par Pasteur.

En 1883, le retour du choléra permet aux deux hommes de s’affronter à nouveau, et c’est le médecin allemand qui remporte cette bataille en comprenant que la maladie se transmet par l’eau et non pas par l’air, tel que le pensait Pasteur. Il met au point des mesures préventives qui permettent de freiner la propagation de cette pandémie.

Pasteur, qui n’a toujours aucune découverte sur les maladies humaines, décide de s’intéresser à la rage. C’est une maladie qui touche relativement peu de personnes mais qui provoque 100 % de mortalité et des symptômes terrifiants : difficultés à avaler, hallucinations, convulsions, comportement agressif voire animal … Elle est causée par un microbe particulier : un virus. Les virus étant 20 fois plus petits que les bactéries, ils ne sont pas visibles avec les microscopes de l’époque, Pasteur se bat donc contre un ennemi invisible. De plus, les virus, contrairement aux bactéries, sont toujours nocifs et à l’origine de maladies. Ils sont constitués d’une capsule de protéines – une capside – et d’un brin de matériel génétique, et se développent en parasitant les fonctions de réplication de la cellule hôte. On pourrait penser ici aux antibiotiques comme solution. Mais ceux-ci ont, d'une part, été découverts beaucoup plus tard (au XXème siècle) et sont, d'autre part, de toute façon inopérants dans un tel cas. En effet, ils empêchent la multiplication des bactéries mais pas celle des virus. Pasteur est donc à cette époque, en premier abord, sans armes face au virus. 

C’est en réalité Émile Roux, son disciple, qui trouve une solution. Il arrive à atténuer le virus de la rage en utilisant de la potasse, une base (l’inverse d’acide) faite de carbonate et de chlorure de potassium. Grâce à ce virus atténué, Pasteur vaccine de nombreux chiens avec succès. En 1885, il a alors l’occasion de vacciner un enfant mordu par un chien enragé, son vaccin n’est pas entièrement au point mais il décide de prendre le risque. À la fin du traitement, pour être sûr que ce dernier fonctionne, Pasteur inocule à l’enfant le virus de la rage. L’éthique médicale actuelle ne permettrait plus un tel acte. L’enfant est guéri, Pasteur devient alors une star internationale et des personnes du monde entier viennent se faire vacciner.

Tandis que Pasteur est au sommet de sa gloire, de son côté Koch vit une descente aux enfers. L’annonce mondiale de sa découverte : la tuberculine, pour soigner la tuberculose, est en fait un fiasco, il est vu comme un charlatan. Il fait également l’objet d’un scandale personnel en divorçant de sa femme pour une jeune actrice de 17 ans.

En 1894, le retour de la peste est l’occasion pour les deux hommes de vivre une dernière joute par disciples interposés, l’Institut Pasteur contre l’Institut Koch. C’est Alexandre Yeslin, de l’institut Pasteur qui découvrira le bacille à l’origine de cette maladie.

Pasteur s’éteindra un an après cette victoire Française et Koch en 1910, après avoir reçu cinq ans plus tôt un des premiers prix Nobel de médecine.

Cette confrontation scientifique aura durée une vingtaine d’années et aura permis de faire de grandes découvertes dans le domaine de la médecine. C’est une nouvelle ère pour cette discipline, les maladies, sont à partir de ce moment là, définies par leur cause et non plus par leurs symptômes. 


Clara Perissat