Numérique et médiation : la révolution ?
Publié par Gaelle Perrier, le 12 avril 2016 7.4k
Avec l’arrivée des tablettes, des écrans et des tables tactiles, les musées et centres de Science ont changé de visage. Autrefois poussiéreux, exposant squelettes de dinosaures et documentaires sur les fourmis, ils sont aujourd’hui plus en vogue que jamais.
Grenoble, 27 septembre 2014, le CCSTI lance l’application mobile « Crystal Z », première mini-série de Science-Fiction inspirée de la culture zombie et dédiée à sensibiliser les jeunes à la cristallographie (la science des cristaux) et à ses applications. Fun ? Bien sûr. Efficace ? A voir. Pourquoi les centres d’exposition de la culture scientifique, que ce soient les musées ou les CCSTI, s’intéressent-ils aux nouvelles technologies numériques ? Entre autres serious games, tablettes tactiles, et dispositifs à réalité augmentée comprenons-nous vraiment mieux la science que dans un manuel classique ?
Apports du numérique à la culture scientifique.
Tombés quelque peu en désuétude au cours des années 90, les lieux de la CST connaissent aujourd’hui une nouvelle jeunesse. A grand renfort de designers, de développeurs et de graphistes, ils proposent à présent des supports interactifs, invitant le public à prendre part à l’exposition. Tables tactiles, logiciels d’analyse du visiteur et de leurs émotions, jeux vidéo plus vrais que nature ; le public ne reste jamais insensible devant ces nouveaux supports, qui interrogent notre rapport aux technologies modernes. Le numérique n’est plus seulement le sujet de l’exposition, il en est le support. Et le numérique plait ! Grande conclusion de l’étude menée par deux étudiantes en InfoCom à Grenoble : la science n’a jamais été aussi populaire. Débarrassée de son image d’institution poussiéreuse la CST et sa «Fête de la Science» rassemble chaque année des milliers de curieux.
Apprend-on vraiment mieux sur une tablette tactile ?
Si la science paraît donc plus attractive lorsqu’elle est exposée par le biais d’une appli pour smartphone que dans un manuel, le numérique est-il pour autant plus instructif ? Suivant le grand courant de la démocratisation culturelle, les lieux de médiation scientifique ont d’abord pensé que le numérique serait un outil de co-construction des savoirs et d’implication du public dans les débats de la Science. Désillusion. Le numérique, bien que vendeur en terme de marketing territorial, n’est pas obligatoirement vecteur de contenus de meilleure qualité En effet, les dispositifs numériques, bien que plus faciles d’accès, ne permettent pas nécessairement de mieux comprendre une problématique scientifique. Pour cette raison, la figure humaine du médiateur ou du guide, qui présente le problème mis en scène par l’exposition, reste ressentie comme nécessaire par les publics. Nous en revenons donc à la critique classique de la médiation (et de la médiation scientifique donc) : de bons supports n’impliquent pas nécessairement une bonne méditation.
Nouveaux supports et nouvelles pratiques de médiation.
Au niveau des médiateurs de la CST, le numérique a tout de même fait bouger les lignes.Sans parler d’une révolution de la médiation par le numérique, les médiateurs se sont néanmoins approprié ces nouveaux outils de travail que sont les tablettes tactiles et autres supports numériques innovants. A Grenoble, ou ailleurs, ils peuvent manipuler les contenus, concevoir des interventions personnalisées, bref, mieux s’adapter aux personnes qu’ils ont en face d’eux. Le numérique est devenu un outil formidable de proximité entre le public et les Centres de Science, puisque le médiateur peut jongler entre des supports « anciens » (cartes, cartels, modélisations) et des supports « nouveaux ». Les squelettes de dinosaures et les fourmis ont donc encore de beaux jours devant eux dans les Musées des sciences, mais ils devront à l’avenir côtoyer tablettes tactiles et audioguides !
Flora Petit et Gaëlle Perrier