Maintien à domicile, un défi technologique

Publié par Reine Paris, le 20 mai 2013   2.9k

Près de vingt ans après avoir créé l’appartement intelligent, les chercheurs du laboratoire AGIM continuent de réfléchir à de nouvelles solutions de maintien à domicile des personnes fragilisées et/ou dépendantes.

Imaginez un appartement équipé de capteurs qui saisissent le moindre de vos mouvements. Vous n’êtes pas dans un décor de science-fiction, loin de là. Le deux-pièces dont il est question existe depuis 1994 et se situe dans le bâtiment Jean Roget à la Faculté de Médecine de Grenoble.  Les chercheurs du laboratoire, Age-Imagerie-Modélisation (AGIM*), y testent leurs dernières inventions pour lutter contre la dépendance et permettre aux personnes âgées et handicapées d’habiter plus longtemps chez elles en toute sécurité.

Bientôt 4 000 patients suivis à domicile

Afin de concevoir et de déployer des équipements adaptés, ils travaillent depuis des années en étroite collaboration avec les secteurs industriels et associatifs. Recevoir des messages de rappel de rendez-vous sur son écran de télévision, appeler ses proches grâce à une tablette tactile à l’usage simplifié, voilà quelques exemples des technologies développées dans ce domaine. Depuis mars 2013, en plus de ces activités, le laboratoire AGIM mène un nouveau projet : il assure au sein d’un consortium d’acteurs (entreprises, mutuelles…) la maîtrise d’œuvre recherche de Vision Home Presence interactive (VHP@interactive). Ce projet labellisé Investissement d’Avenir veut démontrer la viabilité d’une nouvelle offre de services pour le maintien à domicile des personnes dépendantes. VHP@interactive cible l’installation chez 4 000 patients d’un dispositif de suivi intelligent actif qui permet la surveillance du diabète de type 2 et favorise les liens de la personne dépendante avec l’extérieur.

Au service des usagers

En travaillant sur ces différentes thématiques du maintien à domicile des personnes en perte d’autonomie, les chercheurs du laboratoire AGIM ont une vraie ambition : assurer leur santé, leur sécurité et leur bien-être sans être intrusif et sans peser trop lourdement sur leur portefeuille. Ils se rendent chez les particuliers ou dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) afin de rencontrer les futurs usagers et d’évaluer les besoins qui existent aujourd’hui. « Pour concevoir des solutions de maintien à domicile, nous demandons directement aux utilisateurs ce qu’ils veulent et nous n’hésitons pas à évoquer les coûts et l’argent qu’ils sont prêts à mettre dans ces dispositifs ou services. On réfléchit ensuite à des solutions adaptées à leurs besoins et à leur budget », explique Nicolas Vuillerme, maître de conférences à l’Université Joseph Fourier, membre junior de l’Institut universitaire de France et responsable de l’équipe Gérontologie, E-santé et Modélisation (GEM) au laboratoire AGIM. Très vite, les caméras ont été écartées, les personnes âgées ne supportant pas de se sentir observées. « On a aussi compris qu’elles ne veulent pas d’un appartement high Tech, mais souhaitent conserver leur mobilier.»

Des capteurs détectent les mouvements dans l'appartement

De nouvelles possibilités pour des diagnostics précoces

Afin de respecter les désirs exprimés par les usagers, les chercheurs ont imaginé des capteurs très discrets qui détectent par exemple un appareil électrique resté allumé ou les mouvements dans l’appartement. « Si une personne passe trois heures dans la salle-de-bain, c’est inhabituel, il faut déclencher une alerte. Il arrive aussi qu’on observe des dérives de comportement : la personne passe ses nuits sur le canapé, elle ne sort plus de chez elle, elle répète la même action sans nécessité. En s’intéressant aux activités d’une personne, c’est-à-dire à son actimétrie, on peut déceler des signes précoces d’une maladie. » Si les solutions auxquelles réfléchissent les chercheurs du laboratoire AGIM sont souvent technologiques, elles sont parfois très simples : «  On fait donc aussi beaucoup d’ergonomie dans les appartements. Notre objectif est de permettre aux personnes âgées de continuer à réaliser les activités qui ont un sens pour elles, que ce soit aller chercher du vin à la cave ou faire la cuisine pour leurs petits-enfants. Pour cela, nous adaptons le domicile aux habitudes et aux capacités fonctionnelles de son occupant », précise Nicolas Vuillerme. Une manière de rappeler qu’il n’y a pas de science sans conscience et que la technologie ne remplacera jamais l’humain.

>> Contact : postgres.vuillerme@agim.eu

>> Note : AGIM : UJF/CNRS/EPHE/UPMF

>> Source :  Article initialement publié sur le site de l'Université Joseph Fourier sous le titre "Dépendance : concilier santé, sécurité et autonomie à domicile, un enjeu technologique"

>> IllustrationsGramophone Maryland (Flickr, licence cc), AGIM