Les plantes alpines à l’assaut des cimes…

Publié par Encyclopédie Environnement, le 15 juin 2018   4.6k

En montagne, les prairies alpines ont reverdi. Au Jardin alpin du Lautaret, quelques rares fleurs, plus précoces que les autres, fleurissent dans les zones bien exposées au sud, là où la neige – très abondante cet hiver- a rapidement fondu au soleil. D’autres plantes émergent des plaques de neige éparses qui persistent encore ici ou là.

La plupart des plantes alpines sont des plantes vivaces, elles ont repris leur croissance après la période de dormance hivernale. L’épais manteau neigeux les a protégées contre le gel. Désormais, elles vont devoir faire face aux conditions environnementales souvent difficiles et fluctuantes imposées par le milieu alpin. Pourtant, dans quelques semaines, au Col du Lautaret, dans la vallée de Névache, dans le Parc des Ecrins ou celui de la Vanoise, la végétation sera à son optimum de floraison, pour l’émerveillement des randonneurs. Comment les plantes alpines peuvent-elle s’épanouir aussi vite dans un environnement aussi hostile ? Des articles publiés dans l’Encyclopédie de l’Environnement aident à le comprendre.


Le massif de la Meige vu du Jardin Alpin du Lautaret. Photo © Serge Aubert/SAJF




Comment les plantes supportent-elles les stress alpins ?

Les plantes, qui vivent fixées au sol, ne peuvent échapper aux contraintes imposées par le milieu (Lire J.F. Briat). En altitude, les plantes peuvent être soumises à de fortes contraintes : luminosité et rayonnement UV intenses, faible pression partielle de CO2, grandes variations de température… Autant de paramètres qui varient au cours des saisons mais dont l’amplitude peut aussi fortement changer d’un jour à l’autre comme au cours de la journée. Ces paramètres modulent et parfois perturbent la photosynthèse qui utilise l’énergie apportée par la lumière et permet la croissance et le développement des végétaux vivant dans le milieu alpin. Ainsi, l’excès d’énergie lumineuse conduit à la formation de composés toxiques, comme les dérivés réactifs de l’oxygène. Pour s’adapter à ces conditions difficiles, les plantes alpines développent diverses stratégies : très petite taille, écran protecteur contre le rayonnement UV, structures anatomiques protectrices, mécanismes pour dissiper l’énergie lumineuse en excès, détoxification des dérivés réactifs de l’oxygène, etc.


Comment les plantes peuvent-elles s’adapter pour vivre et se reproduire ?

Deux stratégies principales permettent aux plantes alpines de persister, génération après génération : le maintien d’une reproduction sexuée ou le recours à la reproduction dite végétative.


Linaire des Alpes (Linaria alpina) dans les schistes du Galibier (2600 m). Photo © Serge Aubert/SAJF


La période de végétation est très courte dans les milieux alpins. Peu de sites sont propices à l’installation des graines, la pollinisation est difficile à cause de la rareté des insectes et des vents souvent violents. C’est pourquoi les plantes annuelles ont du mal à s’y développer. Au contraire, les plantes pérennes ou vivaces peuvent s’y maintenir, car elles mettent en œuvre plusieurs stratégies : vivre longtemps, étaler leur reproduction sur plusieurs années et augmenter leur durée de floraison. De plus, pour éviter les aléas de la reproduction sexuée, de nombreuses plantes alpines ont recours à la reproduction végétative : production de rhizomes ou de stolons, formation de drageons, etc. Ce n’est pas une spécificité des végétaux de montagne, toutefois la proportion de plantes utilisant ce mode de reproduction augmente avec l’altitude.


L’adaptation des organismes vivants à leur environnement

Les contraintes environnementales rencontrées par les différentes populations d’une même espèce façonnent l’expression des traits maximisant la survie et/ou la reproduction des individus localement. La théorie de la sélection naturelle a été enrichie au fil du temps par la découverte des bases moléculaires de la variation génétique et de l’importance du hasard dans l’évolution des traits. Plus récemment d’autres mécanismes tels que le transfert non génétique d’information d’une génération à l’autre (épigénétique) et la symbiose (coopération interspécifique) semblent avoir un rôle important dans le potentiel adaptatif des individus et des populations. Plus d’un siècle et demi après Darwin et à l’aube d’une sixième extinction de masse d’une ampleur inédite initiée par les activités humaines, il est plus que jamais nécessaire de comprendre tous les mécanismes à l’œuvre dans l’adaptation des organismes à un environnement en pleine mutation.


²Androsace helvetica est un exemple de plante alpine pérenne vivant dans un milieu dépourvu d’espèces annuelles, ici à 2800 m d’altitude, dans des rochers schisteux du col du Galibier. Photo © Serge Aubert/SAJF



En savoir plus avec les articles de l'Encyclopédie de l'Environnement :


Mais aussi :

Textes de l’exposition Sur les iles du ciel : et si Darwin avait été alpiniste ? au Museum d’Histoire naturelle de Grenoble (jusqu’au 26 Août 2018).


Ce travail a été réalisé grâce au soutien financier d'UGA Éditions dans le cadre du programme "Investissement d'avenir", géré par l'Agence nationale de la Recherche.


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