Les films d'horreur, ont-ils des vertus ?

Publié par Quentin Clutier, le 3 avril 2023   8.7k

À votre avis, les films d'horreur ne servent qu'à se divertir comme tous les autres films ? Et bien, la réponse est non ! Les films d'horreur nous réservent bien des surprises ! En effet, contrairement à ce que l'on peut penser, les films d'horreur ont des effets bénéfiques sur notre corps ainsi que sur notre cerveau. À travers cet article, nous allons définir ce qu’est un film d’horreur et voir quels sont ses effets bénéfiques et pourquoi nous réagissons comme ça.

Mais qu’est-ce qu’un film d’horreur ?

Pour être sûr que l’on parle de la même chose, on va définir ensemble ce qu’est un film d’horreur. Les films d’horreur sont des films d’épouvante ayant pour objectif de susciter chez le spectateur un sentiment d’effroi, de peur. Dans la catégorie film d’horreur, il y a plusieurs sous-genres comme le slasher (film mettant en scène les meurtres d’un tueur psychopathe éliminant ses victimes méthodiquement à l’arme blanche) avec comme titres connus Vendredi 13 ou encore Freddy.

Pour éviter de vous perdre, un film d’horreur est souvent construit de la même manière, c’est-à-dire que pendant les 10 premières minutes du film il y a une scène d’horreur qui va mettre le corps en alerte, ce qui va permettre de garder l’attention du spectateur pendant toute la durée du film. Pendant les 20 premières minutes, la narration du film va favoriser les signes d’anxiétés, car nous savons que des moments de peur vont arriver. Jusqu’à la 70ème minute, la narration a pour but de nous laisser toujours en alerte : notre anxiété va augmenter. Les scénaristes de films d’horreur utilisent plusieurs techniques pour faire augmenter l’anxiété, comme par exemple : faire croire que quelque chose d'horrible va arriver à l’un des personnages, alors que non. Puis entre la 70ème et la 90ème minutes, l’atmosphère est pesante, le suspense est à son comble, puis vient le soulagement de la fin !

Connaissez-vous l'histoire du film d'horreur ?

Maintenant, que l’on a bien défini ce qu’est un film d’horreur, êtes-vous au point pour ce qui est de son historique et de son évolution ? Non ? Et bien, on va faire un rappel de son histoire :

1896
Le manoir du diable, premier court-métrage d'horreur muet.
Années 30
Frankenstein, Dracula, films d'horreurs glamour mettant en avant de jolis corps.
Années 40




La féline, de Jack Turner, considéré comme étant le premier film d’horreur d’après Karel Quistrebert.
C’est dans ce film que sont apparus les premiers jumpscares (faire monter la tension et finalement se rendre compte que ce n’est qu’un chat). C’est un effet beaucoup utilisé dans la réalisation de films et de jeux d’horreur.
Années 60

Création de films d’horreur avec du sexe et du gore (en oppositions avec les films d’Hollywood) pour plaire aux adolescents.
Années 70





Halloween avec l’utilisation du noir pour laisser place à l’imagination du spectateur. Cependant, cet effet du noir, du film Halloween, se voit de moins en moins utilisé au fils du temps. En effet, nous pouvons remarquer que les films d’horreur les plus récents sont plus “clairs” que les plus vieux films d’horreurs, ils montrent de plus en plus de choses, ce qui chagrine Karel Quistrebert (créatrice du Festival des Maudits Films, désormais connu sous le nom de “Maudit Festival”).
Années 2000

Scream reprend tous les anciens codes du film d’horreur et il y a également l’apparition de nouveaux sous genres.

Pourquoi aimons-nous nous faire peur ?

Selon des scientifiques, il est compliqué d’expliquer exactement pourquoi nous aimons cela, cependant selon eux, il semblerait que ce plaisir, à se faire peur soit en lien avec notre personnalité. Les parties du cerveau réagissant à la peur et au plaisir sont étroitement liées, ce qui expliquerait pourquoi certains aiment tant les films d’horreur, même s'ils savent en avance que les films réveilleront leurs peurs les plus profondes.

Pour Karel Quistrebert, c’est le plaisir de se faire peur en toute sécurité qui plaît autant : « L’être humain aime se faire peur ». Une personne regarde un film d’horreur pour en ressentir les émotions fortes depuis un endroit sécurisé comme son salon ou une salle de cinéma.

Les films d’horreur nous préparent-ils à réagir face à une menace ?

Figurez-vous que oui, les films d’horreur nous préparent à affronter une menace. Comment ? Pourquoi ? Tout simplement parce que lorsque l’on regarde des films d’horreur, nous sursautons. Après un sursaut, l’activité cérébrale est plus forte dans les régions qui traitent des émotions, ce qui favorise l’évaluation des menaces et la prise de décision. Ces régions du cerveau sont également en lien avec la partie sensorielle de celui-ci ce qui permet à notre cerveau de se préparer à agir en réponse à une menace. Notre système nerveux sympathique, à cause de la peur et de l’excitation que procure le visionnage, va augmenter le niveau de cortisol et d’adrénaline dans tout le corps. Ces hormones vont aussi aider à préparer le corps à réagir en toutes circonstances.

Lorsque l’on regarde un film d’horreur, notre anxiété va augmenter lentement, ce qui va avoir pour conséquence de booster l’activité des zones du cerveau impliquées dans la perception visuelle et auditive. Cela va donc permettre la détection plus poussée de signes et de menaces dans l’environnement. Ces zones du cerveau sont toujours en lien avec la zone qui traite des émotions pour pouvoir préparer une réponse adaptée à la situation.

IRM réalisé par des chercheurs.
En haut, ce sont les zones du cerveau activées lorsque le spectateur est en crainte imminente.
En bas, ce sont les zones du cerveau activées lorsque le spectateur a des sursauts et des peurs soudaines.

Lors de nos moments de frayeur pendant le visionnage du film, nos pupilles vont se dilater pour augmenter la sensibilité de nos yeux et élargir notre vision pour percevoir les potentielles menaces. Mais ce n’est pas tout, notre corps va avoir une réaction d’effarouchement. La réaction d’effarouchement est une réaction classique de la peur, c’est lorsque nos muscles se contractent, que notre pouls accélère et que notre respiration augmente pour que notre corps soit prêt à l’action : qu’il soit prêt pour combattre ou pour fuir (c’est souvent la meilleure option).

Les autres effets sur le corps humain

Pendant les pics de peur lors du visionnage, le système nerveux sympathique va activer les glandes sudoripares eccrines lorsque nous sommes effrayés. En plus simple, lorsque nous avons peur, nos paumes de mains vont transpirer. Mais ce n’est pas le dernier effet sur le corps humain. Il y a également des palpitations, une augmentation de la circulation sanguine des intestins vers le cerveau et le cœur dans les moments de suspense.

Mais nous avons également notre peau qui va réagir pendant le visionnage. Nous avons la chair de poule, cet effet est lié à nos instincts animaliers. Nos poils vont se dresser sur notre corps, tout comme les chats lorsqu’ils se sentent menacés.

À la fin du film, le cerveau va retrouver son calme en quelques minutes, et les battements cardiaques vont diminuer pour retrouver un rythme normal. Vous risquez de vous sentir fatigué après votre visionnage, c’est tout à fait normal. Votre cerveau a beaucoup travaillé, vous avez brûlé des calories, eu des montées d’adrénalines, … Et tous ces éléments sont fatigants. Il est donc logique que vous soyez fatigué à la fin du film. C’est comme si vous aviez marché 30 minutes au niveau des calories. La libération d’adrénaline, la production de dioxine de carbone et l’augmentation de la consommation d’oxygène brûlent très vite des calories. Nous ne dirons pas que c’est un moyen pour perdre du poids, mais presque ! Ce qui est sûr par contre, c’est que ça réduit votre appétit et vous permet de digérer plus rapidement.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les films d’horreurs ont aussi des bienfaits pour les personnes anxieuses ! Cela peut sembler paradoxal, mais ce type de films peut nous aider à gérer le stress. Le fait d’avoir peur de notre propre volonté, tout en étant dans un environnement où l’on se sent en sécurité, nous pousse à nous laisser envahir par ce sentiment et nous pouvons ainsi mieux le contrôler. C’est un peu comme les maisons hantées ou les montagnes russes. Surtout que le stress généré par ces films n’est pas mauvais, comme on l’a abordé précédemment, nos montées d’adrénalines nous font nous sentir plus détendus après car nos mécanismes de stress ont été beaucoup sollicités. Notre corps va donc s’immerger dans un état de détente et de repos.

Ces films nous laissent aussi un sentiment de bien-être et de bonheur grâce à toute la dopamine et la sérotonine libérée, c’est d’ailleurs pourquoi beaucoup de couples visionnent des films d’horreurs ensemble. Ce sont les mêmes hormones qui se libèrent quand on tombe amoureux.

En plus de ça, ils permettent de calmer notre esprit, de faire le vide dans notre tête et de mettre tous nos soucis en pause. Nous sommes tellement concentrés sur ce qu’il va se passer que nous ne pensons à rien d’autre. Nous mettons une partie de notre cerveau hors service. C’est un bon moyen de distraction si nous voulons arrêter de penser pendant quelques heures. Aussi, être autant à l'affût d'éléments va booster notre activité cérébrale, c’est-à-dire que nous allons faire attention au moindre détail, à la musique, aux lumières, pour ensuite imaginer plusieurs solutions d’échappatoire au scénario. Notre cerveau va libérer des neurotransmetteurs pour nous plonger dans un état de grande concentration. Et dans le cas où une situation similaire vous arriverait dans la vraie vie (on n’espère pas pour vous) votre capacité à réagir aux situations extrêmes s’augmente en regardant des films d'horreurs.

Le dernier bienfait que procure le visionnage de ces films est le renforcement du système immunitaire. En effet, la peur et le stress que nous ressentons produisent des globules blancs et favorisent leur circulation. Ce qui est bien utile étant donné qu’ils permettent à notre organisme de combattre les maladies infectieuses.

Une thérapie pour soigner ses phobies ? La thérapie d’exposition 

D’après une étude (publiée dans la revue scientifique Britannique Personality and Individual Differences en 2020), les personnes regardant beaucoup de films d’horreur ont tendance à créer des signaux de détresse psychologique plus faibles par rapport à l’épidémie de la COVID-19. Après cette étude, certains scientifiques ont donc commencé à se demander si utiliser des films d’horreur pour des thérapies d’exposition n'aiderait pas certaines personnes à vaincre leurs phobies. De plus, les films d’horreur permettent de rester dans un environnement sécurisé malgré la peur qui peut être provoquée, ce qui est grandement recherché dans cette thérapie.

La thérapie d’exposition permet donc à une personne de confronter ses phobies, dans un cadre rassurant et protecteur. Elle a pour objectif d’aider les personnes à se désensibiliser de leurs phobies. Cela dit, cette thérapie n’est pas seulement utilisée pour aider à surmonter une phobie, mais également pour les troubles anxieux, les troubles obsessionnels compulsifs…
Cette thérapie fonctionne sur le principe d’exposition comme son nom l’indique. C’est-à-dire que la personne doit regarder dans un cadre sécurisant des films d’horreur ayant pour sujet sa phobie pour y être moins sensible.

Il y a deux manières d’effectuer cette thérapie : de manière réelle (avec le sujet de la phobie directement devant soi) ou via l’imaginaire (méthode utilisant des photos, des vidéos…). Dans les deux cas, la démarche se fera de façon graduelle ou directe. Si la démarche se fait de façon graduelle, le patient est alors exposé aux stimuli anxiogènes (sa phobie) dont le degré d’exposition à ceux-ci va croître progressivement. Si la démarche est directe, le patient sera directement exposé aux stimuli anxiogènes maximaux. Ainsi, les films d’horreur sont utilisés dans la thérapie d’exposition via l’imaginaire.

Conclusion

En conclusion, regarder des films d’horreurs ne sert pas uniquement à gaspiller du pop-corn en se faisant peur ! En effet, comme nous avons pu le voir, les films d’horreur nous préparent à combattre des situations délicates en boosstant l’activité du cerveau grâce à l’augmentation de cortisol et d’adrénaline (attention, vous ne deviendrez pas Mohammed Ali !). En plus de ça, vous resterez sur le qui-vive grâce à vos pupilles dilatées et votre réaction d’effarouchement qui vous fera vous accrocher à votre siège et bondir à chaque jumpscare. Ces films nous aident aussi à gérer notre stress et nous font oublier tous nos problèmes pendant quelques heures. Ils vont également vous permettre si vous regardez le film avec votre partenaire, cela vous permettra de vous rapprocher de celui-ci grâce à la libération de sérotonine et de dopamine. Par contre, il n’y a pas que des bons effets, vos mains vont devenir moites, vous aurez la chair-de-poule, ce qui n’est pas très glamour et vous serez super fatigué à la fin du visionnage.
Les films d’horreur sont également utilisés à des fins thérapeutiques en exposant les patients face à leurs plus grandes peurs pour qu’ils apprennent à les maîtriser.




Nous remercions Karel QUISTREBERT, libraire à la librairie l'Entre-Image à Grenoble, et fondatrice du Maudit Festival de Grenoble, qui nous a beaucoup aidé pour la rédaction de cet article.
Vous retrouverez en document joint la bibliographie de nos sources.

Auteurs : BARDEAUX Samantha, BARRAND Justine et CLUTIER Quentin