Le Patrimoine scientifique et technique contemporain (PSTC) en action : Voyage dans la généalogie du smartphone

Publié par ACONIT (Association pour un Conservatoire de l'Informatique et de la Télématique), le 28 avril 2023   1.1k

La genèse d’une exposition conçue et réalisée par l’association Tedimage38


Jean-Luc Berger

Qui s’étonne encore aujourd’hui de tout ce que nous pouvons faire avec un smartphone ? Cet objet nous est devenu comme un prolongement de nous-mêmes, un compagnon quotidien, quasi indispensable. Il nous permet, entre autres, de communiquer et transmettre instantanément parole, images, vidéos et textes d’un bout à l’autre de la planète. Ce qui nous est devenu naturel aujourd’hui était impensable autrefois. La compréhension des phénomènes physiques exploités dans les communications instantanées de nos téléphones a mis des siècles à s’élaborer. Elle s'est considérablement accrue, avec des mises en œuvre de plus en plus performantes depuis le milieu du XIXème siècle. Autrement dit, le smartphone n’est pas tombé du ciel et chacune de ses prouesses a une histoire particulière.

Il se trouve que l’association Tedimage38 (1) a hérité d’un patrimoine important de tubes et dispositifs capables de capturer et restituer électroniquement des images. Ce sont les ancêtres, souvent volumineux, des composants miniatures qui assurent aujourd’hui ces fonctions dans nos smartphones. Ils ont pour la plupart été développés et fabriqués sur le site Emile Girardeau de Thomson-CSF à Saint-Egrève, près de Grenoble. Ce site industriel, construit par la CSF (2) en 1955, est l’un des berceaux de la microélectronique française. C’est sur ce site par exemple que furent fabriqués industriellement en France les premières diodes et transistors en germanium, 8 ans après leur découverte dans les laboratoires Bell aux USA en 1948.


Des témoins de l’histoire technique sauvés de la destruction et de l’oubli

Les produits en notre possession ont été mis de côté au moment où leur production s’est arrêtée. Ils étaient en général destinés à la poubelle puisqu’ils étaient remplacés par des produits plus modernes, plus performants et n’avaient donc plus de débouchés commerciaux. Celles et ceux qui les avaient étudiés et fabriqués, souvent pendant des décennies, avaient développé une forte relation affective à ces objets, fruits de leur labeur. Ils en ont sauvegardé quelques exemplaires, soit en les ramenant chez eux, soit en les stockant quelque part dans l’usine, sous l’œil bienveillant d’une direction locale qui acceptait d’y consacrer quelques mètres carrés avec le vague projet qu’un jour on en ferait un musée. En 2011, lorsque notre association fut créée, nous avons pu récupérer l’ensemble des produits stockés sur le site. Puis chaque année, de nombreux anciens salariés sont venus nous trouver pour nous confier leurs trésors. Et cette démarche spontanée se poursuit encore aujourd’hui !

Certains de ces objets réalisaient la capture électronique des images pour des caméras de télévision. C’était le cas de tubes appelés “vidicons”. C’était aussi la fonction de leurs successeurs miniatures réalisés sur des tranches de silicium, des “CCD”, depuis des prototypes du début des années 1970 jusqu’à des matrices couleur élaborées pour une première caméra numérique au début des années 1980. Signalons aussi quelques capteurs de haute définition des années 2000 destinés à un marché professionnel spécialisé (médical, astronomie et spatial). Nous avons aussi hérité de quelques exemplaires des tous premiers tubes de télévision, des iconoscopes fabriqués en 1937 par une entreprise française, Radio Industrie, rachetée en 1955 par Thomson-Houston et apportés à Saint-Egrève par les anciens de la “rue des Orteaux” (3) lors de la fusion entre Thomson et CSF en 1968.

D’autres tubes électroniques étaient destinés à la transmission électronique des informations par ondes radios : des diodes de détection, des triodes, tétrodes et pentodes d’amplification. Autrefois, on les appelait des lampes radio. Ils étaient aussi appelés “tubes à oxyde” pour évoquer les oxydes de baryum et de strontium utilisés pour faire leurs cathodes émettrices d’électrons dans le vide (effet thermo-ionique). Ils équipaient les récepteurs radio domestiques depuis les années 1930. Dans le domaine des télécommunications, des tubes répéteurs étaient fabriqués pour réamplifier périodiquement le signal téléphonique dans les câbles sous-marins, en particulier dans les liaisons transatlantiques. La maintenance de ces câbles étant très coûteuse, ils devaient avoir des durées de vie supérieures à 10000 heures de fonctionnement.

Ces tubes électroniques sont les ancêtres des dispositifs à semi-conducteurs qui commencèrent à les remplacer dans les années 1960. Dans notre “héritage”, nous disposons des diodes et transistors germanium qui permirent de réaliser en 1957 le premier poste à transistors grand public fabriqué en France par Clarville avec des composants CSF, le Solistor, dont nous possédons aussi un exemplaire. En quelques années, ils furent remplacés par leurs équivalents silicium, et à la fin des années soixante furent fabriqués industriellement les premiers circuits intégrés et les premiers circuits à base de transistors MOS.

Pour la restitution électronique des images, nous disposons d’une collection très diversifiée de tubes à rayons cathodiques. Ces tubes ont équipé tous les téléviseurs depuis la fin des années 1930 et n’ont commencé à disparaître qu’à la fin des années 1990, avec l’apparition des écrans plats bon marché. De très nombreux tubes étaient destinés à l’avionique, aux radars, à l’instrumentation scientifique (oscilloscopes), et à la vidéo-projection. Mais nous disposons aussi de quelques exemplaires destinés à des équipements marquants dans l’histoire des vidéocommunications : le Minitel et le Visiophone. Les études sur de futurs écrans plats commencées au début des années 1970 ont abouti à la conception des écrans plasma, puis des écrans LCD d’aujourd’hui. Nous disposons d’une riche collection de ces produits, surtout pour les panneaux plasma, avec en particulier le premier écran à plasma couleur au monde. Côté écrans à cristaux liquides, Thomson-CSF puis Thales les ont fabriqués surtout pour des applications avioniques. Nous disposons d’intéressants documents pédagogiques sur leur fonctionnement et leur fabrication, destinés à l’époque aux salariés de l’entreprise.

En contemplant ces témoins du passé en notre possession, l’idée nous est venue de leur donner la parole et de les mettre en scène pour illustrer les grandes étapes qui ont permis de transmettre à distance du son et des images. Nous avons voulu de cette façon retracer une partie de l’histoire complexe du smartphone. C’est une vraie confluence d'activités techniques qui a donné naissance à cet objet contemporain. Elle s’est faite à partir des travaux de recherche et développement d’une multitude d’hommes et de femmes qui ont travaillé sans plan concerté à grande échelle, en s’influençant parfois, mais souvent sans se connaître. Nous avons voulu aussi rendre hommage à ces personnes et communiquer, si possible, un peu de leur curiosité, de leur enthousiasme, dans le but d’éveiller de nouvelles vocations de découvreurs qui puissent faire face aux importants défis techniques qui sont à relever par les générations futures.

C’est ainsi que nous avons conçu le projet d’une exposition intitulée “Voyage dans la généalogie du smartphone”.


Des produits du passé à leur exposition aujourd’hui

Pour nous documenter sur les origines les plus anciennes de ces techniques, nous avons eu recours à la richesse prodigieuse des documents numérisés mis à disposition par la BNF (Bibliothèque nationale de France) sur le site Gallica. Un ouvrage nous est apparu particulièrement inspirant : “Physique Populaire de Emile Desbeaux” (4), paru en 1891 chez Camille Flammarion. On y trouve décrits avec une grande précision les premiers téléphones et phonographes, avec aussi la relation de leurs expérimentations futuristes, comme celle du “téléphote” où se dessine le principe de la transmission électronique des images, la télévision – techniquement impossible à réaliser à l’époque. Cela n’empêchait pas l’auteur de rêver à la transmission des images et du son d’un bout à l’autre de la planète à partir des premières transmissions télégraphiques transatlantiques en 1858 et des progrès du téléphone inventé en 1876 : “La mystérieuse électricité, cette fée bienfaisante qui a tant fait pour nous, ne pourrait-elle pas d’un coup de baguette magique faire apparaître à nos yeux les sites les plus lointains, les choses et les hommes des autres latitudes en même temps que le Téléphone nous apporterait leur image ?” puis cette gravure page 8, au tout début de l’ouvrage :

Sa légende indique : “Oui, on entendra et on verra - à des milliers de lieues de distance - l’œuvre que l’on chante à l’Opéra ou la pièce que l’on joue à la Comédie Française”.

Ainsi, dans la généalogie de notre smartphone, accompagnant les toutes premières réalisations techniques, nous trouvons aussi le rêve de quelques visionnaires ! Il nous est apparu naturel de faire figurer cette gravure comme point de départ de notre future exposition. Ce fut l’occasion de réaliser une première vidéo d’introduction (5).

Pour donner la parole à nos produits, nous avons aussi cherché à rassembler tous les documents édités à leur sujet : notices techniques, annonces dans la presse, rapports d’étude et aussi journaux de communication interne à l’entreprise. Nous avons recueilli des témoignages auprès des anciens qui les avaient fabriqués en organisant des “causeries” enregistrées ou des interviews.

Pourvus d’objets témoins remarquables et de la documentation nécessaire pour mener à bien notre projet, il nous fallait maintenant organiser l’information, trouver un lieu d’exposition et des partenaires qui puissent compléter nos apports et nous fournir un soutien, en particulier financier. Début 2020, nous avons pris contact avec l’Aconit, association grenobloise qui détient un patrimoine considérable d’objets sur l’histoire de l’informatique. Nous avons reçu un accueil très favorable et une offre de collaboration.

Puis la Covid est arrivée qui nous a freiné considérablement dans notre élan. Alors nous avons décidé de réaliser au moins une version virtuelle de notre future exposition : “L’arbre généalogique du smartphone” (6), accessible sur notre site début 2021 et qui continue de s’enrichir encore aujourd’hui.

Ce fut l’occasion de créer, par l’intermédiaire de sa délégation académique gérée par l’ACONIT, des liens entre certains de ces objets et la base de données nationale pour la conservation du patrimoine scientifique et technique “PATSTEC” (7).

Ce premier travail nous a permis de prendre conscience que nous disposions d’une matière première très importante et qu’il ne nous serait pas facile de la rendre accessible à des visiteurs en la distribuant dans l’espace. Nous avons réalisé qu’il nous faudrait un local d’au moins 180 m² pour réussir à tout faire rentrer ! Nous nous sommes quand même mis à la recherche d’un lieu qui puisse accueillir notre exposition...

Nous avons proposé notre exposition à la commune de Saint-Egrève pour les Journées du patrimoine. Cela nous a semblé tout indiqué en raison de l’importance du site historique de “la Thomson” où beaucoup de Sant-Egrévois ont fait leur carrière (dans le milieu des années 1960, le site employait près de 2000 personnes). La commune nous a fait bon accueil et envisageait que notre exposition puisse se faire au sein de la bibliothèque Barnave, qui dispose d’une salle de 65 m². Nous avons alors décidé de restreindre nos ambitions : laisser de côté toute la partie historique sur le traitement de l’information pour centrer notre présentation sur les communications par l’image et le son.

Lors de notre premier entretien avec les personnes en charge de la bibliothèque, une nouvelle contrainte nous est apparue : le public n’est majoritairement pas de culture scientifique, beaucoup d’enfants fréquentent la bibliothèque et il est envisagé d’organiser des visites scolaires... Le contenu de notre exposition devra être capable d’intéresser des enfants de niveau CM1 ou CM2.


A la recherche d’un parcours et d’une pédagogie adaptée à tous les publics

Nous avions pensé au départ à un parcours dans lequel nous exposerions les objets techniques en notre possession en racontant leur histoire et leur fonctionnement par le moyen de vidéos et de panneaux explicatifs. L’idée était aussi de montrer les révolutions techniques et les transformations successives qui leur ont permis d’entrer dans le tout petit espace du smartphone. C’est ce que résume la vitrine ci-dessous, où l’on voit au centre un smartphone d’où ont été extraits ses principaux composants, avec leurs ancêtres respectifs placés en périphérie.

Chacune des branches, comme l’émission-réception radio, la capture et restitution du son et de l’image, possède une histoire particulière, mais toutes ont des origines dans des découvertes qui ont eu lieu au XIXème siècle. Nous avons donc décidé de faire partir notre récit de ces découvertes. Et nous avons sélectionné trois d’entre-elles, parmi les plus significatives, pour en faire des présentations vivantes et accessible à tous :
- L'invention du téléphone par Graham Bell en 1876 ;
- La découverte des ondes électromagnétiques par Heinrich Hertz en 1886 et leur détection par Edouard Branly en 1890 ;
- La découverte de l’électron par Joseph Thomson en 1898.

Pour illustrer chacun de ces grands moments de l’histoire scientifique et technique, nous avons voulu faire revivre aux visiteurs les moments clés du vécu des découvreurs : ce qu’ils cherchaient, ce qu’ils ont fait pour l’obtenir, ce qu’ils ont vu se produire, ce qu’ils en ont déduit et les applications qui en ont été faites par leurs successeurs.

Cela nous a conduit à construire des maquettes pédagogiques, en veillant à ce que certaines d’entre elles puissent être reproduites “à la maison”, quand c’était possible.


Des expériences pédagogiques au début du parcours d’exposition

Ainsi la maquette de l’écouteur de Bell est constituée d’une bobine de fil électrique capable de faire vibrer un couvercle de boite de conserve, et que le microphone, inspiré de celui de David Edward Hughes (1878), est fait d’une mine de crayon suspendue entre deux morceaux de fusain et fixés sur un couvercle de boite de camembert. Avec un diapason vibrant placé devant ce dispositif, on peut observer la transformation de l’onde sonore en onde électrique sur une application d’oscilloscope d’un ordinateur portable et entendre sa reproduction dans un écouteur (8). Ces expériences sont aussi l’occasion de raconter l’histoire de Graham Bell, dont la vocation première était de rendre la parole aux sourds-muets. C’est avec persévérance qu’il s’ingénia à utiliser les propriétés de l’électricité et du magnétisme pour créer des appareils capables de transmettre la voix humaine. Il aurait déclaré devant l’incrédulité de son entourage : « J'ai fait parler des sourds-muets, vous verrez que je saurai donner la parole au fer ! » (9)

Pour illustrer l’expérience de Branly, nous avons construit une petite machine électrostatique à influence, réalisable avec des matériaux que l’on peut trouver dans une grande surface de bricolage. La source électrique est une barquette alimentaire frottée avec un chiffon. Elle génère des charges par influence sur des languettes de métal disposées en cercle sur un disque tournant actionné par une manivelle. Les charges induites sont accumulées sur des bouteilles de Leyde en plastique remplies d’eau salée, avec pour armatures une feuille d’aluminium à l’extérieur et un fil en inox à l’intérieur. De belles étincelles de 1 cm de long peuvent être obtenues avec cette machine rudimentaire. Elles peuvent être détectées à proximité par un peu de limaille de fer répandue sur une planchette entre deux clous d’où partent des fils électriques vers une LED et une pile de lampe de poche. Les ondes émises par l’étincelle rendent conductrice la limaille de fer et la lampe s’allume. Il suffit de taper un peu sur la planche pour disperser la limaille et reproduire l’expérience avec une nouvelle étincelle (10). C’est la reproduction du cohéreur de Branly, cet appareil très simple et au fonctionnement mystérieux (élucidé seulement au XXème siècle), qui a inspiré si fortement Marconi et fut à l’origine de l’essor de la télégraphie sans fil (TSF) et des radiocommunications. Pour faire l’expérience à la maison, on peut remplacer la machine électrostatique par un allume gaz piézoélectrique ou réaliser simplement un électrophore de Volta grâce à un plateau métallique tenu par un manche isolant (11). Cette expérience est l’occasion de raconter de façon imagée la vie compliquée des électrons lorsqu’ils se trouvent exilés loin de leur atome d’origine.

Pour illustrer la découverte de l’électron, nous avons utilisé un tube de Crookes d’époque et une alimentation haute tension (suffisamment basse cependant pour ne pas générer de rayons X !), le tout placé dans une vitrine protectrice en verre. On peut y observer l’ombre d’une croix de Malte se dessinant sur la lumière verte générée par l’impact d’un rayonnement mystérieux, sur la paroi en verre du tube. Cette expérience, par contre, ne peut pas être reproduite à la maison ! En contrepartie, nous avons pu raconter la perplexité des savants de l’époque qui ont cherché pendant plus de 30 ans d’où pouvait provenir cette lumière verte. Le courant électrique devant circuler entre la cathode et une anode placée dans un angle du tube, d’où venait ce faisceau se propageant en ligne droite bien au-delà de l’anode et illuminant le verre ? L'énigme fut élucidée en 1898 par Joseph Thomson qui reçut le prix Nobel pour cela. Dans ce tube, des particules chargées négativement, accélérées par la haute tension positive de l'anode et ne pouvant prendre le virage pour la rejoindre, du fait de leur masse et de leur vitesse, continuent leur trajectoire en ligne droite, jusqu'à frapper la paroi en verre dont elles stimulent l'émission de lumière. Ces particules, inconnues à l'époque, furent appelées… électrons.


Quelques grandes étapes de l’histoire de l’électronique

Sur la base de ces animations initiales nous avons pu construire un parcours qui retrace en 9 stands les grandes étapes de l’électronique, pour lesquelles nous disposions d’objets historiques à présenter et commenter :
- Les premiers tubes électroniques (illustration avec un récepteur radio Clarville de 1939 en fonctionnement) ;
- Les tubes à rayons cathodiques (illustration avec un oscilloscopes des années 1960 en fonctionnement, où l’on peut dévier le faisceau d’électrons avec un aimant) ;
- Les tubes caméra pour la télévision (illustration par une maquette pédagogique du “Téléphote” de Emile Desbeaux : une photorésistance en sélénium explore un damier et transmet l’information électrique à une lampe qui ne s’allume que lorsque le sélénium a “vu” de la lumière) ;
- Les premiers écrans plats : les panneaux à plasma (illustration avec le premier écran couleur au monde, fabriqué par TH-CSF à Saint-Egrève) ;
- L’invention et la fabrication des premiers transistors (illustration avec une diode en germanium détectrice d’une étincelle et amplification du signal par un transistor germanium CSF datant du début des années 1960) ;
- L’apparition du transistor MOS et des circuits intégrés (illustration avec une simulation du fonctionnement du transistor MOS avec des billes représentant le courant d’électrons dans le silicium) ;

- Les capteurs d’image CCD ayant permis de réaliser les premiers camescopes et appareils photos numériques (illustration par une maquette pédagogique où le déplacement des paquets d’électrons dans le silicium est représenté par des transferts de billes dans des récipients (12)) ;
- Les capteurs CMOS qui ont remplacé les CCD à la fin des années 2000 et équipent à présent les caméras des smartphones ;
- Les écrans à cristaux liquides qui sont devenus plus portables et moins consommateurs d’énergie que les panneaux à plasma ; ils ont équipé les écrans d’ordinateur et les téléphones portables depuis le milieu des années 1990 (illustration par une maquette qui permet de simuler la capture d’une image par un smartphone sur un capteur CMOS de 5×5 pixels. Ce dernier transforme localement une croix lumineuse en paquets d’électrons déposés dans des pixels. Puis ces paquets d’électrons vont modifier localement un train d’ondes. Ils sont comme des passagers qui montent dans un TGV de 5 wagons. Quand le train arrive à destination, l’information contenue dans chaque wagon génère des paquets d’électrons qui vont allumer ligne par ligne les pixels d’un écran LCD ou OLED, ce qui restitue l’image de la croix sur un écran).

Enfin, pour clore le parcours, nous avons voulu rédiger un panneau sur les usages du smartphone : son impact sur l’environnement, sur nous-mêmes et sur la société. Ce qui nous permet de finir les visites par un échange sur le sujet avec nos visiteurs.


La réalisation concrète

Notre projet ayant une dimension pédagogique et s’adressant aux jeunes générations, nous avons pu recevoir des soutiens financiers du Département de l’Isère et de Grenoble Alpes Métropole. Nous avons aussi été soutenus par la Ville de Saint-Egrève qui, en plus d’une subvention, nous a permis de collaborer étroitement avec l'équipe des Bibliothèques Municipales, dont une personne a assuré l’important travail de réalisation graphique des 15 panneaux au format A0, plus l’affiche et les flyers de communication. Nous avons reçu également de leur part une aide pour le transport et de précieux conseils pour l’agencement du matériel dans l’espace d’exposition. Nous avons bénéficié également d’appareils en prêt qui ont pu être exposés : un des tout premier visiophone datant de 1984 (don de l’association ESTEL) et un visiophone France Telecom de 2004 (prêt de l’association Aconit).

En tout, la préparation de cette exposition a occupé pendant plus d'un an une petite équipe de notre association : recherche documentaire, réalisation de 7 vidéos, conception des maquettes pédagogiques pour lesquelles il y eut pas mal de tâtonnements et de journées de bricolage chez les uns ou les autres.


Une exposition dont le succès nous invite à la reproduire en d’autres lieux

Après une ouverture le 13 septembre 2022 et un vernissage le 24 septembre en présence du Maire de la commune et de plusieurs personnes du conseil municipal, l’exposition a pu accueillir plusieurs centaines de visiteurs pendant ses 90 heures d’ouverture au public et ses 25 visites guidées (13). Une source importante de satisfaction fut pour nous l’intérêt avec lequel les enfants ont suivi les démonstrations qui leurs étaient proposées.

Nous avons reçu de nombreux encouragements pour la reproduire dans d’autres lieux afin qu’un public plus large de scolaires puisse y avoir accès. Ce que nous cherchons à faire en ce moment. Nous pensons aussi l’enrichir, si possible, avec une évocation de l'histoire de l’informatique et éventuellement d’Internet.

Pour finir, une anecdote : l’avant dernier jour d’ouverture, il n’y avait personne de notre équipe pour assurer les démonstrations devant les visiteurs. Un de nos anciens collègues est venu découvrir l’exposition ce jour-là. Il nous a raconté plus tard ce qu'il s’est passé pour lui lors de sa visite : “J’ai bien suivi le parcours en me basant sur les panneaux explicatifs, les vidéos et les objets présentés. Tout allait bien, c’était intéressant. Mais à la fin du parcours, je suis tombé sur quelque chose que je ne comprenais pas : quelque chose comme un petit train avec des wagons sur un rail, un petit tunnel, tout ça entre deux panneaux dont j’avais du mal à comprendre le sens. Là-dessus, arrive une petite fille avec son cartable sur le dos qui me dit : "tu veux que je t’explique ?" Et elle s’est mise à me faire la démonstration : "tu vois là, on allume la lumière, ça fait une croix ici. Là où il y a de la lumière, ça dépose des petites billes dans les petites cases, c’est des électrons..." Et elle dépose des billes dans les pixels du capteur CMOS pour me faire comprendre que ça va voyager ligne par ligne dans des petits wagons, qu’elle déplace jusqu’à un autre endroit où ça va éclairer un écran là où il y avait de la lumière au départ...”.

Ce témoignage nous a fait chaud au cœur : il semble que cette exposition ait pu stimuler une vocation scientifique et technique chez au moins une enfant. Ce qui nous dédommage déjà de tous nos efforts !


Merci à Xavier Hiron et Jacky Dutin pour leur aide dans la mise en forme de ce texte.


Notes :

1- Témoignage des Tubes et Dispositifs à Image fabriqués en Isère - www.tedimage38.org
2- CSF : Compagnie Générale de télégraphie Sans Fil, anciennement SFR, fondée en 1910 par Emile Girardeau. Voir l’histoire du site de Saint-Egrève résumée dans un précédent article Echosciences et aussi www.tedimage38.org/histoire  

3- La rue des Orteaux, à Paris dans le XXème arrondissement, était le siège d’un important site industriel de Thomson Houston dédié à l’étude et la fabrication des tubes électroniques.

4- Lien vers l'ouvrage Physique populaire
5- Présentation introductive de l'exposition

6- Lien vers le portail de l'exposition virtuelle
7- Lien vers le site PATSTEC et la base de données PSTC-ACONIT (cliquez sur Consultation > Liste établissements > Nombre de fiches en tête de la ligne Tedimage38)

8- Pour écouter le Diapason vibrant : Microphone
9- Voir “Le téléphone expliqué à tout le monde” de Pierre Giffard, 1878, page 14, Document BNF sur le site Gallica
10- Pour voir la Machine électrostatique en action
11- Pour voir l'expérience de Volta

12- Pour voir la simulation CCD 

13- Présentation de l’ensemble de l’expo : Généalogie du Smartphone