Le monde à l’envers, 100 ans de cristallographie
Publié par Jean Louis Hodeau, le 26 mars 2012 4.8k
Il y a 100 ans, Max von Laue utilisait des cristaux pour connaître les rayons X tandis que les Bragg père et fils utilisaient les rayons X pour connaître la structure des cristaux. Leurs découvertes ont posé les bases de la cristallographie moderne qui s’appuie sur des outils mathématiques initiés par Joseph Fourier.
Les années 1912 à 1915 ont été des années clefs pour la compréhension des matériaux et des macromolécules. En effet, la cristallographie a pris une autre dimension avec l’observation en 1912, par le physicien allemand Max von Laue, du fait que les rayons X interfèrent avec les cristaux selon une propriété remarquable, appelée la diffraction. Dès 1913, les Bragg père et fils, physiciens anglais, montraient que cette diffraction des rayons X pouvait être utilisée pour définir la position des atomes dans un cristal, et ainsi déterminer sa structure. Ces découvertes ont été récompensées par deux prix Nobel de Physique en 1914 pour Max von Laue et en 1915 pour Sir William Henry Bragg et William Lawrence Bragg.
Ces découvertes magnifiques ont révolutionné les sciences moléculaires et continuent d’irriguer la connaissance au plus haut niveau – comme en attestent les nombreux prix en physique, en chimie ou en médecine attribués depuis les temps pionniers jusqu’aux très récents Prix Nobel de Chimie en 2009 pour Venkatraman Ramakrishnan, Thomas A. Steitz et Ada Yonath pour l’étude de la structure et de la fonction du ribosome et Prix Nobel de Chimie en 2011 pour Dan Shechtman pour la découverte des quasi cristaux.
Aujourd’hui, la cristallographie intervient dans de nombreux métiers de l’industrie tels que la pharmacie, la cosmétique, les cimenteries, l’électronique et apporte aussi une aide précieuse aux archéologues. Elle reste pourtant une science méconnue du grand public français.
A Grenoble, elle est un outil essentiel utilisé dans les instituts de recherche de l’agglomération comme le CNRS, le CEA, l’Université Joseph Fourier et Grenoble INP mais aussi les instituts européens ESRF, ILL et EMBL. Il n’y a qu’à voir les travaux récents des scientifiques grenoblois dans les domaines de la bio-cristallographie et des quasi cristaux récemment récompensés par les prix Nobel 2009 et 2011, mais aussi tous ceux qui s’appuient sur les méthodes initiées par Laue et Bragg.
La communauté des scientifiques grenoblois a conscience de l’importance de ces découvertes et de leur reconnaissance internationale récente, preuve de l’impact de la cristallographie dans notre vie quotidienne. Elle propose de célébrer les 100 ans de la diffraction et de la cristallographie et ses récents développements.
Ainsi, ces chercheurs, ingénieurs, doctorants et acteurs de la culture scientifique (1) travaillent à la réalisation d’un tel événementiel à Grenoble et dans l’Isère. Ils ont exposé leur projet lors du premier Forum des projets de culture scientifique le 6 mars dernier au Stade des Alpes. Celui-ci se déclinera dès l’automne 2012 lors de la Fête de la science en diverses actions selon le profil des visiteurs : (i) actions auprès du grand public sur le rôle de la cristallographie dans notre vie de tous les jours, (ii) auprès des élèves sur la démarche scientifique en prenant l’exemple de Laue, de Bragg et de Fourier, (iii) auprès des scientifiques par l’organisation de workshops scientifiques et historiques et enfin (iv) actions en lien avec les organismes "grand publics" (le Muséum, les musées, les différentes Ecoles et industries et La Casemate).
Note
- Les structures impliquées : Institut Laue Langevin, European Synchrotron Radiation Facility, CNRS, CEA, Université J.Fourier, Grenoble-INP, SiMAP, Institut Néel, INAC, ..., GIANT, Rectorat, La Casemate, le Muséum, Ecoles, Industrie, l’Association Française de Cristallographie et l’International Union of Crystallography.
>> Illustrations : Monteregina (Flickr, licence CC) et Wikipédia / IUCrjournals / AFC