Le Bien Vivre : une alternative au développement actuel

Publié par Vincent Rauzier, le 15 octobre 2018   2.7k

Peut-on croître sans croissance ? La convergence des témoignages venus des quatre coins du monde autour de la notion de bien vivre est puissante : originaires de Bolivie ou du Bhoutan, d’Afrique du Sud ou du Canada, habitant·e.s d’un petit village ou d’une métropole… toutes et tous aspirent à une alternative au développement basé sur la croissance, et dont les dégâts sociaux et environnementaux sont palpables. Mais les acteurs et actrices engagé·e·s sont allé·e·s au-delà du diagnostic : des alternatives concrètes sont déjà mises en œuvre. Elles décalent notre regard et nous incitent à sortir des sentiers battus.  

Une interdépendance entre l'être humain et la nature

Pablo Solon © Auriane POILLET Ville de Grenoble

Dès l’ouverture du forum, la réflexion de Pablo Solon, homme politique bolivien, sur le Bien Vivre rassemble et interpelle. Le Bien Vivre est une vision holistique, qui considère l'humain, la nature et le cosmos comme faisant partie d'un tout. Le Bien Vivre consiste à trouver l'équilibre entre toutes les composantes de ce système interdépendant. Et face aux grands déséquilibres environnementaux, José Alberto Mujica, ancien chef d'Etat uruguayen, interroge notre responsabilité envers le devenir de la terre, de l'humanité et du monde sensible qui nous entoure. 

Un nouveau tempo

© Auriane POILLET Ville de Grenoble

La vision occidentale du « faire plus et mieux » renvoie vers l’idée de progrès infini, dans lequel le temps est linéaire. Au contraire, le Bien Vivre demande de rechercher l’équilibre dans le mouvement. Le temps est une spirale : cela suppose pour chacun et chacune d’accepter les cycles, les avancées et les reculs, qui ne sont jamais des retours en arrière. « Notre rôle fondamental n'est pas de croître indéfiniment, mais de trouver un équilibre dans ce tout » (Pablo Solon). Et pour sortir de la course en avant du temps occidental, une des clés est de savoir s’arrêter, pour apprécier « l'art de vivre à la bonne heure et l'art de la pleine présence » (Patrick Viveret, philosophe, France).  

La relation comme richesse

© jean-sebastien FAURE Ville de Grenoble

La relation - aux autres, au monde, à soi - est une dimension centrale du Bien Vivre, une source de richesse à part entière. « Vivre bien, c’est construire une société dans laquelle chaque personne a sa place, est reliée aux autres et reconnue par eux comme quelqu’un qui a de la valeur, qui a quelque chose à apporter et à recevoir des autres » (Elena Lasida, économiste, France). Cette attention fondamentale à ce qui nous lie trace une ligne d’action très claire pour Freddy Ehlers (homme politique équatorien) et Raffi Duymedjian (penseur de la chaire paix économique) : la paix devient l’objectif premier. La paix avec la nature, la paix dans la communauté et la paix avec soi-même. 

 

Jenito Santana © Auriane POILLET Ville de Grenoble

Les savoirs ancestraux, une source d'inspiration...

Au Timor-Leste, la protection de l'environnement en faveur des générations futures est inscrite dans la constitution. Pour construire une société faite davantage de bien vivre, nous nous sommes inspirés de la méthode du Tara Bandu. Cette loi coutumière est un instrument traditionnel utilisé par nos ancêtres. Elle vise à aider les personnes, à respecter la nature, l'environnement et les animaux. Nous cherchons à promouvoir ce code social et à l’enrichir avec des règlementations plus modernes, pour que les gens vivent en harmonie et en paix.

Jenito Santana, animateur éducateur, et militant au sein de l'ONG KSI (Timor Leste)


Texte extrait du document bilan du Forum international pour le bien vivre.
Journaliste : Julie Fontana & Comité de pilotage du Forum.
Toutes les photographies d'illustration : © Ville de Grenoble