La pollution lumineuse
Publié par Célia Jemili, le 7 avril 2020 2.9k
La pollution lumineuse
« En 2016, 83 % de la population mondiale et plus de 99 % de la population des États-Unis et de l'Europe vivaient sous un ciel pollué par les éclairages artificiels. Un tiers de l'humanité ne voit plus la voie lactée dont 60 % d'Européens et près de 80 % des nord-américains. »1 On connaît les effets que cette pollution lumineuse a pour les hommes, mais sait-on vraiment les effets de cette même pollution sur la faune sauvage et domestique ? Dans cet article, nous allons dans un premier temps, définir le phénomène de la pollution lumineuse, puis dans un deuxième temps nous allons vous démontrer ses effets et ses impacts sur la faune, et enfin dans un troisième et dernier temps nous allons vous donner des pistes pour remédier à cette pollution.
Petit rappel sur la pollution lumineuse
Définition
La pollution lumineuse ou photopollution, est un phénomène anthropique, ce qui veut dire qu’il est lié au développement des activités humaines. La pollution lumineuse désigne un excès de lumière artificielle nocturne qui masque la lumière naturelle comme les étoiles.
1
Sciences Advances, 2016
Selon l’Union Astronomique Internationale, il y a photopollution quand la lumière artificielle est supérieure à 10% par rapport à la luminosité naturelle de la nuit. Chez les humains la pollution lumineuse peut affecter le rythme biologique en perturbant le sommeil.
Concernant les animaux, cette pollution peut affecter leurs rythmes biologiques comme chez les humains, leurs activités nocturnes, ainsi que leurs migrations. Le rythme biologique se définit par le cycle de vie d’un être vivant.
Où ? Quelles lois ?
La pollution lumineuse est répartie tout autour du globe, mais elle se concentre dans quelques endroits en particulier. On en trouve en majorité en Europe, Asie et Amérique du nord, plus précisément en France, au Japon et aux États-Unis.
A l’échelle locale, ce sont les grandes villes qui éclairent le plus : Pékin, Tokyo, Paris… Les capitales sont une source lumineuse particulièrement importante.
On peut remarquer que le continent africain est le moins pollueur, avec l’Australie. Cela provient non seulement des éclairages de la ville mais de magasins qui laissent parfois leurs lumières allumées toute la nuit.
Ces magasins sont dans l’illégalité car depuis l’arrêté du 27 décembre 2018 pour la prévention, réduction et limitation des nuisances lumineuses, les magasins et tous autres locaux professionnels doivent avoir éteint leurs lumières une heure après que les personnes y travaillant l’aient quitté.
Au niveau des articles de loi, il en existe plusieurs, le plus important étant l’article L.583-1 du code de l’environnement. Celui-ci aide à mieux comprendre les raisons de préserver la luminosité naturelle. Tout d’abord, car la pollution lumineuse pose des problèmes et met en danger des êtres vivants (humains, animaux, ou végétaux), mais aussi car c’est un gaspillage d’énergie, et enfin car les lumières artificielles cachent le ciel et empêchent de voir les étoiles. L’objectif de cette loi est donc de prévenir, limiter et réduire les sources de luminosité artificielles. L’article L.583-1 est appuyé par l’article L.583-2 qui donne les mesures mises en place pour atteindre ces objectifs. Les maires sont les personnes majoritairement concernées par cet article puisqu’ils doivent veiller à ce que les éclairages des bâtiments ne dépassent pas les normes.
Enfin viennent deux autres articles, nommés R.583-1 et R.583-7 définissent ces normes, notamment en énumérant les structures concernées et définissent aussi les zones pour permettre à n’importe quel endroit de s’adapter (par exemple, une petite ville ou une agglomération).
Pour
terminer, l’article R.583-1 appuie l’arrêté du 27 décembre
2018 sur les structures concernées par les réglementations.
Grâce à ces réglementations, certaines zones de pollution lumineuses ont nettement diminué entre 2006 et 2015 (CF cartes).
Pollution lumineuse dans le monde en 2006
Pollution lumineuse dans le monde en 2015
Quel type d’éclairage ?
Les éclairages cités ci-dessous sont plus particulièrement prompt à produire de la pollution lumineuse :
-
L’éclairage
public et routier car afin de garantir la sécurité de tout le
monde, les intensités lumineuses sont souvent supérieures à
celles requises.
-
L’éclairage
industriel et commercial pour attirer des clients
-
L’éclairage
des parkings
-
Les éclairages
des maisons car ils ne sont pas soumis à une réglementation
spécifique
Par rapport à ces éclairages, il faut savoir que si l’éclairage est de mauvaise qualité ou s’il est allumé à des horaires superflues alors la photopollution est amplifié.
Quels sont les impacts sur la faune ?
Plusieurs chercheurs ont prouvé que la pollution lumineuse pouvait avoir un impact sur la faune en commençant par des modifications comportementales. Ils constatent notamment 2 comportements distincts : l’un répulsif, l’autre attractif. Le comportement répulsif se traduit par un éloignement de la source lumineuse. C’est en quelque sorte une migration de l’animal pour échapper à son prédateur : la lumière. Le comportement attractif se manifeste lui, chez les animaux nocturnes comme un rapprochement à cette lumière. Cependant en utilisant cette lumière pour s’orienter, les oiseaux peuvent être la cause de désorientation.
D’autres animaux sont sujet à cette pollution. Les crapauds, que le chercheur Thierry Langagne étudie, mettent trois fois plus de temps à se reproduire. Résultat, il y a une menace réelle pour cette espèce que nous sommes à même de côtoyer. Selon le chercheur, à cause de la pollution lumineuse, c’est bien un « effondrement de la population des espèces » que nous sommes en train de vivre.
Les études scientifiques menant sur l’impact de la pollution lumineuse sur la faune sont encore pour la plupart méconnues. Pour le moment, des données fiables ont été récoltées seulement sur les oiseaux, qui révèlent d'importantes modifications liées à leurs physiologies et à la reproduction. La source « encyclopédie-environnement.org » dont l’Université Grenoble Alpes est un des partenaires, nous informe qu’« une étude réalisée en 2013 montre que la synthèse d’une hormone photosensible, la mélatonine, est partiellement inhibée chez les oiseaux exposés à la pollution lumineuse. Or, cette hormone assure la synchronisation des différents rythmes biologiques de l’organisme, chez les oiseaux comme chez les mammifères. Elle pourrait donc être impliquée dans les décalages observés ». Ces observations sont essentielles pour comprendre que nos comportements sont à modifier dans les plus brefs délais. Dans un cas contraire, l’impact de cette pollution sur la faune pourrait avoir des conséquences irréversibles. En atteste le cas des rongeurs étudiés en laboratoire. Les chercheurs nous montrent que les rythmes biologiques sont déjà modifiés entraînant des troubles du métabolisme (intolérance au glucose, prise de masse corporelle), des comportements dépressifs jusqu’à la diminution de réponses immunitaires.
La pollution lumineuse représente un danger sur tout le spectre animalier. Les déséquilibres se ressentent et entraîne une modification de l’environnement ou nous vivons. En résulte des compétitions entre espèces comme la chauve-souris. La chauve-souris à vol rapide a plus de facilité à chasser les regroupements d’insectes sur les lampadaires que sur sa cousine à vol lent. Au final la nourriture revient toujours aux mêmes, ce qui place en danger les plus vulnérables. Cette compétition peut expliquer pourquoi les chauves-souris à vol rapide se font de plus en plus nombreuses en Europe, fragilisant les autres espèces. En sommes, la pollution lumineuse représente bien un réel danger pour les espèces.
Les inadaptations de l’animal par rapport à l’homme sont de plus en plus fréquentes, fragilisant les espèces à tous les niveaux.
Comment remédier à cette pollution ?
Les solutions pour régler le problème causé par la pollution lumineuses ne sont pas très compliquées. Or, elles n’ont pas d’effet immédiat car une fois les dispositifs installés il faut du temps avant que la faune ne se reconstruise correctement.
La plupart des solutions sont réalisables par les institutions comme l’Etat, les Régions, les municipalités et communautés de communes. En effet, il faut des réglementations, lois ou décrets pour faire avancer les choses. Notons en premier des directives sur l’extinction des feux à une certaine heure de la nuit.
La question a été réfléchie par Jean-Philippe SIBLET, Directeur du Service du Patrimoine Naturel du Muséum National d’Histoire Naturelle. Il a ainsi rédigé un document dans lequel il expose des solutions cohérentes. On retrouve dans son étude la photographie et le schéma suivant :
Ainsi, une l’une des solutions pour réduire
la pollution lumineuse est donc de réaménager les équipements
lumineux, avec un éclairage vers le sol, ou d’ « installer des
déflecteurs sur les lampes pour éviter l’éblouissement » par
exemple. De plus, Jean-Philippe SIBLET parle aussi de « faire
disparaître progressivement les lampes à vapeur de mercure,
consommatrices en énergie et très nocives pour la biodiversité, et
leur substituer des lampes au sodium basse pression ». Enfin, il
donne un exemple pour parer au problème en mer, celui d’installer
des lumières sans la couleur rouge dans leur spectre sur les
plateformes pétrolières. Les oiseaux migrateurs ne sont ainsi plus
attirés par la lumière.
D’autres solutions sont possibles : dans le volume 70 la Revue Médicale de Liège, un article parle de la pollution lumineuse. On apprend que pour éviter la pollution lumineuse, il faut installer des lumières automatiques ce qui réduit considérablement l’éclairage inutile. On retrouve également le choix des lumières avec une composition spectrale plutôt rouge et verte. Des catadioptres peuvent être également placés sur la route ou les ronds-points pour refléter la lumière des phares des véhicules au lieu d’en produire.
Enfin, l’article appui l’argument de l’éducation qui est nécessaire pour que la population prenne conscience des impacts de la pollution lumineuse et ainsi sensibiliser le public et les inviter à moins éclairer leurs habitations la nuit.
Comme nous l’avons vu, la pollution lumineuse n’est pas un phénomène naturel. Elle s’est développée avec des activités intrinsèquement liées à l’homme comme la mondialisation par exemple. Elle impacte l'environnement de manière drastique en détruisant et en modifiant les comportements animaliers. Ce qui amène certaines populations à migrer vers des lieux moins exposés à la lumière. Malheureusement le phénomène de la pollution lumineuse reste assez invisible depuis notre “chez soi”, on ne se rend pas compte que cette pollution détruit des écosystèmes pourtant proche de nous. Des mesures sont bien mises en place mais elles restent encore insuffisantes.
Cet article a été écrit par Bouchard Clément, Leloux Minke, Crenel Pauline et Jemili Célia.
Sitographie
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Images
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