La Namibie, ça brille - Retour sur une semaine de sprint design avec le Master 2 CCST

Publié par Alicia Dalongeville, le 22 septembre 2024   120

En ce début d’année scolaire 2024/2025, dans le cadre de l’UE Scénariser l’information scientifique dirigée par Laura Schlenker, les étudiant·es en master 2 de Communication et Culture Scientifique et Technique (CCST) ont été commandités par la galerie Eurêka de Chambéry et le laboratoire de recherche EDYTEM, pour prototyper un dispositif de médiation scientifique. Le thème : l’extraction des pierres semies-précieuses en Namibie. En 3 jours et demi, nous avons imaginé des formats, des dispositifs et du contenu pour répondre à la commande. Cet article raconte le déroulé de la semaine de travail et les différentes étapes du processus créatif.


Lundi - Chambéry :  documentation et recueil des informations

Cette première journée était destinée à la collecte des informations sur les commanditaires, le contexte et les attendus pour le projet. Nous avons rencontré des représentants de la galerie Eurêka et de l'équipe de recherche du laboratoire EDYTEM. Nous avons ainsi pu recueillir les informations nécessaires à la mise en œuvre de notre projet, telles que le public cible, les contraintes techniques, et les éléments scientifiques à présenter, ainsi que les attentes des commanditaires.


Une présentation complète de la galerie Eurêka, du laboratoire EDYTEM et des recherches dans lesquelles s'inscrivent notre projet est détaillée dans cet article. L’objectif de notre projet était de proposer un dispositif pour la galerie Eurêka sur le thème des mines artisanales de pierres semi-précieuses en Namibie, et de sensibiliser les publics aux enjeux environnementaux, sociaux et économiques liés à cette pratique.
A partir des éléments fournis par ces deux parties prenantes du projet, nous avons commencé à travailler dès 17h à notre hôtel à Chambéry, afin de mettre à chaud nos premières idées de problématisation.


Mardi - Chambéry : ideation

La journée du mardi était dédiée au processus "d'idéation” visant à synthétiser les informations recueillies la veille pour faire germer collectivement des idées de contenu et de formats.

  • Problématisation et idéation : 

Le mardi matin, après un premier exercice collectif destiné à “réveiller notre attention”, nous avons fait émerger une problématique commune pour le projet “Comment sensibiliser le public aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux de l'origine des pierres semi précieuses à travers l'exemple des mines artisanales en Namibie”. Nous avons également fait une synthèse des projets des trois promotions précédentes, ayant des sujets très différents mais qui permettaient de tirer de l’inspiration en termes de méthode.

Nous avons ensuite pu nous emparer du sujet et laisser parler notre créativité avec une activité de réflexion collaborative par demi-promo. Chacun devait écrire sur un post-it ce que lui inspirait le sujet, que ce soit quelque chose de très concret ou une idée générale. Nous avons ensuite mis en commun en étalant les post-its au sol comme un océan d’idées, puis nous avons collectivement classé ces derniers en grandes catégories : dispositifs expérimentaux, dispositifs artistiques, concepts.

 

Après le déjeuner, nous avons regroupé les post-it des deux demi-promo, et chacun et chacune d'entre nous avons voté pour deux idées qu’il aimerait concrétiser : un choix du cœur et un choix logique (que nous nous sentions capable de prototyper). Le vote s’est fait en silence à l’aide de gommettes de couleur afin de ne pas s’influencer les uns les autres. Les quatre idées ayant récolté le plus de gommettes ont été sélectionnées comme les meilleures idées issues de notre réflexion collective : un tunnel immersif, un jeu de société, un bac à fouille et une exposition “du bijoux à la mine”.

La promo s’est divisée en quatre groupes de quatre ou cinq étudiants, et chaque groupe a sélectionné une idée afin de la développer en prototype. Notre groupe, nommé La Tome en raison de notre amour commun pour ce fromage savoyard, a choisi de travailler sur l’idée “Du bijoux à la mine” qui propose une chronologie inversée des pierres semi-précieuses en commençant par un bijoux et en retraçant les différentes étapes suivies par les pierres jusqu’à leur extraction dans les mines artisanales de Namibie.

Nous avons commencé à brainstormer et très vite le concept a été source de nombreuses idées pour le groupe. Partant du fait que tout le monde a une histoire avec des bijoux, cette entrée muséale était un point d’accroche facile pour capter les publics. Nous avons pioché 4 autres post-it dans les idées qui restaient afin de construire notre visite. Nous avons retenu l’exposition photographique des mains et nous l’avons imaginé comme fil conducteur de l’exposition: chaque étape de la chronologie des pierres sera illustrée par une photo de mains de l’acteur impliqué tenant une pierre. Ce fil rouge artistique permet de montrer la diversité des acteurs et d’illustrer visuellement les problématiques socio-économiques du processus. Nous avons également choisi d’intégrer à notre exposition une carte interactive qui permettrait de mettre en lumière les différentes zones géographiques de Namibie où sont situées les mines artisanales, et de montrer les conflits socio-culturels entre mineurs et propriétaires fonciers. Afin de solliciter plusieurs sens et d’immerger les visiteurs, nous avons sélectionné le dispositif de douche sonore qui sera mis en place sur différents modules afin de retranscrire le paysage sonore de chaque étape. Et enfin, nous avons choisi de faire un diorama des stands de ventes de bijoux, tout d’abord à l’entrée de l’exposition sous la forme d’un étal de bijouterie, puis des stands de vente directe sur le bord des routes Namibiennes ou aux marchés locaux. Ces dioramas permettront de dresser un portrait des conditions de vie et de travail des populations locales, tout en mettant en lumière le contraste entre le consommateur acheteur de bijoux européen et le producteur de pierre semi-précieuse namibien.

  • Présentation des idées aux commanditaires

Après ce rapide temps de brainstorming, la promo s’est à nouveau réunie avec les commanditaires de la Galerie Eurêka et du laboratoire EDYTEM afin de leur présenter les quatre idées ayant émergées de notre réflexion collective. Chaque groupe a fait une rapide présentation de l’idée et du dispositif qu’il proposait de développer, et les commanditaires ont pu faire des suggestions et mettre en avant des points de vigilance.

 Le directeur de la galerie et les chercheurs ont été emballés par les quatres dispositifs proposés, et leurs retours constructifs ont permis à chaque groupe de s’assurer d’être sur la bonne voie pour la suite du processus de création. Concernant notre projet, l’idée de la chronologie inversée a plu et l’idée de l’exposition photographique des mains a particulièrement parlée à l’équipe de recherche. Les chercheurs ont également pu apporter quelques précisions sur les étapes de la chronologie des pierres et corriger certaines inexactitudes sur notre plan initial (par exemple le fait que les pierres sont lavées et préparées directement dans les camps de mineurs), ce qui nous a fourni une base solide pour entreprendre la phase de prototypage.

17 h 27 : il est l’heure de dire au revoir à la Savoie et de prendre le train retour pour continuer l’aventure à Grenoble.


Mercredi - Grenoble ICM : Prototypage

Cette troisième journée était dédiée à la production du prototype qui serait présenté aux commanditaires le lendemain. L’objectif était de produire dans un temps très court un prototype permettant d’immerger le jury du mieux possible dans nos idées.    

  • Matin : brainstorming

Le projet s’est continué à l’Institut de Communication et des Médias (l'ICM à Échirolles) et la journée a commencé par un exercice de lâcher prise. L’exercice se nomme “le miroir” ou encore “la poupée de chiffon” et il consiste à se mettre en binôme avec une personne se détend et se laisse guider par l’autre. La difficulté est de se relâcher complètement, de ne pas anticiper les mouvements et de ne pas se contracter. Le second exercice avait pour but de nous montrer qu’il était possible de construire en résonance les un(e)s avec les autres en faisant un jeu de construction de phrase. Un mot après un mot, le binôme créait une phrase qui devait avoir un sens.
Ces trois exercices matinaux ont été réalisés pour nous montrer qu’en construisant ensemble, nous trouvions souvent une voie commune, à écouter ce que disent les autres afin de co-construire une histoire commune à d’idées parfois très différentes.
Cette première heure passée, les 4 équipes se sont réunies pour décider quel dispositif nous developperions. Il a fallu décider sur la base des compétences de chacun et chacune, et du temps imparti, quel format nous pouvions sortir du numérique pour présenter quelque chose de physique au jury, les commanditaires du projet, le lendemain.

Puisque lors de notre première présentation de la veille, les commanditaires semblaient intéressés par l’exposition photographique des mains qui serait le fil conducteur du dispositif, nous nous sommes vite mis d’accord qu’il fallait en faire une bonne ébauche. Nous avons aussi envisagé une maquette 3D sur sketchup mais cette idée a vite été écartée au vu du temps que nous avions. A la place, nous avons fait un plan 2D avec les thèmes de chaque module de l’exposition. Enfin, un dispositif plus tangible consistait à développer un prototype de diorama de stand de vente.

  • Après midi : création

Une fois d’accord sur les éléments à produire, nous nous sommes répartis les tâches en fonction de nos envies et de nos compétences propres. Au maximum de sa motivation et de sa productivité, notre groupe a produit en quelques heures le plan 2D, le diaporama qui servirait de support de présentation pour le rendu, la série de photos de mains, une banque de sons pour les douches sonores, un prototype de stand de vente.
L’équipe de chercheurs nous avait fourni des pierres ramenées de leur terrain en Namibie sous différentes formes (brutes, polies, taillées, montées en bijoux) que nous pouvions utiliser pour nos prototypes. Ils nous avaient également donné un dossier de vidéos duquel nous avons pu nous inspirer pour le diorama et extraire des bandes sonores.
Pour l’exposition photo fil rouge, nous avons mis en scène nos mains photographiées de la même manière avec une pierre pour symboliser chaque étape suivie par la pierre. La première photo était donc des mains manucurées tenant une paire de boucles d’oreille, et la dernière des mains poussiéreuses tenant une pierre brute.
A la fin de cette journée à forte productivité, nous avons produit un prototype de stand à partir de cartons et de pierres et bijoux, un plan 2D complet de l’exposition, une maquette numérique d’une vente de pierre par WhatsApp, une maquette numérique de la carte 3D présentant l’emplacements des massifs montagneux où sont situés les mines, et la série de photos des mains


Jeudi - Grenoble : Jour de soutenance, le rush final !

Cette journée était dédiée aux derniers ajustements des prototypes et du rendu final, puis à au pitch de nos projets aux commanditaires.

  • Matin : derniers réglages

Comme chaque matin, nous avons débuté avec un exercice, deux membres de la promo devaient donner chacun le premier mot qu’il leur venait à l’esprit. Après quelques secondes de réflexion, deux autres personnes devaient trouver un mot qui lie ces propositions. La plupart du temps, les mots donnés étaient soit identiques soit dans le même champ lexical.
Cet exercice nous a permis de comprendre qu’avec des choses différentes, ici des mots, mais dans le projet des dispositifs, nous pouvons créer quelque chose de commun qui ait du sens. L’idée était de construire une histoire commune entre les quatre prototypes développés par les quatre groupes pour la présentation au jury.
Notre groupe a utilisé cette matinée pour, dans un premier temps, finaliser la présentation des prototypes. Dans un second temps, pour échanger avec un autre groupe sur nos prototypes respectifs. Cette étape nous a permis d’entendre leurs retours et, au besoin, ajuster ou modifier des aspects du prototype et de la présentation. Nous avons également réparti le temps de parole entre les quatre membres du groupe.
Nous étions quatre groupes à soutenir et évoluer dans le même espace, l'amphithéâtre imposait des contraintes de taille et de disposition. Nous nous sommes donc tous regroupés pour décider d’un axe scénaristique, de l’ordre de passage et du placement des différents dispositifs dans l’espace.

  • Après-midi : pitch devant le jury

Après avoir décidé de l’ordre de passage des groupes, nous avons effectué un filage tous ensemble. Ce filage nous a permis d’avoir des transitions fluides et cohérentes entre les groupes.
Nous avons effectué la soutenance de notre projet devant un public composé des première année de Master CCST et des membres du jury : les commanditaires de l’études (galerie Eurêka et chercheurs d’EDYTEM) et les responsables pédagogiques du master CCST. Ces soutenances ont été suivies d’un moment d’échange avec le jury.

Conclusion

Les commanditaires du projet ont semblé très satisfaits de nos propositions et ont trouvé les prototypes très aboutis par rapport au temps court que nous avions. Les retours que nous avons eu ont été globalement très positifs et la galerie mettra peut être en place l’une de nos idées pour une future exposition ou événement.
De notre côté, l’expérience a été très instructive et formatrice. Nous avons pu mettre en œuvre de nombreuses compétences et savoirs-êtres acquis au cours de notre formation et de nos expériences professionnelles, et travailler de façon collective pour des “vrais” commanditaires avec un cahier des charges et un timing à respecter. Ce projet nous a ainsi donné un avant-goût de nos futures vies professionnelles, et en bonus nous auront peut-être la fierté de voir certaines de nos idées exposées à la galerie Eurêka de Chambéry !


Article et photos par : Alicia Dalongeville, Angélique Noël, Chloé Ettouati et Hector PILLOT