La France face aux crises : entre dérive autoritaire et risques géopolitiques. (Partie I)

Publié par Yannick Chatelain, le 21 mai 2024   680

Une contribution de Yannick Chatelain, Professeur Associé Digital / IT, GEMinsight Content Manager, Grenoble Ecole de Management.

J’ai pu évoquer dans un précédent article la censure par invisibilisation des « démocraties » et le phénomène du « Shadow Banning » : une pratique algorithmique obscure qui invisibilise certains utilisateurs sur les réseaux sociaux, en raison de leurs discours – aussi argumentés et factuels soient-ils – afin de mettre concomitamment en avant les discours dominants ceux qui ne vont pas à l’encontre de la doxa actuelle qui sévit en France – et au niveau de l’UE – notamment le narratif « raccourci » des origines de la guerre actuelle (cf. Guerre du Donbass) soutien indéfectible et financier du gouvernement Ukrainien qui ne souffre pas contestation, et dans une «  disposition » à être « prêt » à aller jusqu’à la guerre avec la Russie. Il faut adhérer, cela ne souffre pas le débat. Il n’a pas lieu d’être, à moins d’être – qualifié de « pro Poutine » ce qui est une caricature pour le moins simpliste.

Dans la situation de tension internationale majeure que nous traversons, liée à la guerre en Ukraine, il est de fait « de bon ton » d’adhérer à cette doxa pour « faire Nation » quoi qu’il en coute, ce qui peut « apparaitre » normal « pour certains », tout comme cela est « pour d’autres » une grave source d’inquiétude pour ce qui concerne le bon fonctionnement démocratique ! (Cf. Cette invisibilisation de discours dissonants exclue, comme elle ostracise, in fine des experts crédibles et paradoxalement indispensables à un véritable « Débat démocratique » !

http://www.w3.org/2000/svg" viewBox="0 0 24 24" fill="currentLes crises qui perturbent notre fonctionnement démocratique se sont multipliées. Il est bon d’en rappeler les origines. Avant la crise du covid ou l’absurde s’est souvent invité comme la norme (cf. personne seule en forêt verbalisée, autorisation de sorties que vous pouviez multiplier à l’envi, citoyen-barman devenant des « auxiliaires-policiers » et auscultant les QR code etc. et initiant un inédit contrôle du citoyen par le citoyen) avant la guerre du Donbass, avant le mouvement européen de nos agriculteurs, la crise de notre démocratie remonte aux premières manifestations des Gilets jaunes. Ce soulèvement populaire a révélé un profond mécontentement social et une méfiance à l’égard du gouvernement. Depuis, les crises se succédant, la tentation autoritaire, dont le contrôle de l’information et le contrôle des masses se sont largement développés. « Gouverner c’est prévoir », toutefois « Gouverner l’imprévisible » au corps défendant du pouvoir est autrement plus complexe. Cette volonté de contrôle qui ne cesse de s’accroître est un sujet délicat qui en englobe plusieurs autres :

  • La liberté de la presse.
  • La régulation des médias.
  • La censure, les débats sur la désinformation et les « fakes news ».
  • La répression des contestataires (cf. manifestations.)

Si en France, la censure officielle est supposée rare, le gouvernement, comme les gouvernements précédents, peuvent être tenté de contrôler l’information, par exemple, en exerçant des pressions politiques, en intimidant des journalistes, en intervenant auprès des acteurs du net, (sans qu’il ne soit possible de prouver à ce jour leurs injonctions pour cibler et invisibiliser certains opposants) ou en portant des poursuites judiciaires contre des médias ou des journalistes. En outre, le spectre d’une éventuelle guerre avec la Russie est une autre menace sérieuse pour les libertés publiques.

Cet article s’appuie et se conclura par les réflexions de Hannah Arendt[1], Levitsky et Ziblatt[2], Linz[3], Snyder[4] concernant les démocraties et les dérives qui, dans certain contexte, peuvent les menacer. L’objet de cet article, n’est pas de prendre une position personnelle qui ne pourrait être qu’altérée par ma subjectivité ! Je ne détiens aucune vérité, et si tel était le cas je la libèrerai, la seule ambition de cet article est que chacun puisse disposer de clé de lecture, d’identifier des points de vigilances, invitant à une réflexion personnelle, permettant de se forger une opinion sur la période trouble que notre démocratie traverse et la façon citoyenne d’agir et de réagir.

Les origines de la crise politique en France.

La crise politique en France a des origines anciennes. D’une part, les inégalités croissantes et la stagnation économique ont suscité un sentiment de colère et d’exclusion de la population qui ne bénéficie pas du système. Les gilets jaunes en 2018 que j’ai évoqué en préambule en sont l’exemple le plus prégnant. Elle a mis en lumière des divisions sociales et économiques graves. D’autre part, l’insatisfaction et le mécontentement envers les institutions politiques traditionnelles ont joué un rôle crucial. Les multiples scandales qui – depuis toujours (cf. Liste de scandales politiques français) – gangrènent la vie politique et l’absence de réel progrès ont grandement réduit la légitimité des gouvernants. Les citoyens se sentent distants et impuissants face à l’élite, une élite qui « semble » se moquer de ses besoins et de ses préoccupations tout en semblant jouir d’une forme d’impunité dans ses propres dérives. Enfin, cette crise politique a été nourrie par la montée des partis populistes et une polarisation croissante de la société. Les abîmes idéologiques s’approfondissent, rendant difficile le consensus et les solutions. Dans ce contexte de tensions, il est essentiel de comprendre les racines profondes de la crise politique Française afin d’élaborer des solutions appropriées et efficaces pour « tenter » s’il n’est déjà trop tard, rétablir la confiance et renforcer la démocratie.

Les réflexions de Arendt, Levitsky, Ziblatt, Linz, Snyder et Dahl, comme outils de… réflexion :

Dans le contexte que j’évoque, les raisonnements de Hanna Arendt, Steven Levitsky, Daniel Ziblatt, Juan Linz, Charles Richard Snyder et Robert Alan Dahl sont cruciaux pour comprendre les risques de dérives associés à la crise politique actuelle en France (et en Europe) sur fond de crise internationale majeure, afin que le lecteur puisse se faire une opinion éclairée. Ces auteurs se sont révélés être des penseurs éminents qui ont étudié divers aspects des régimes autoritaires et des démocraties imparfaites et, par conséquent, fournissent des informations pertinentes et des clés de lecture, sur la possibilité d’une dérive autoritaire en France (ou d’autres démocraties).

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