L’observation et la photo animalière, en 4 étapes

Publié par Antoine Ciceron, le 15 avril 2020   3.7k

En tant que Grenoblois, nous avons la chance d’être encerclés par une nature magnifique à proximité immédiate.

Qu’il s’agisse des montagnes, des plaines ou des milieux humides, les zones voisines abritent de fascinantes espèces de faune et de flore, que je me suis efforcé de mettre en avant ces 3 dernières années.

Vidéaste d’entreprise depuis 2011, je troque parfois ma caméra contre un appareil photo et parcours les bois et les champs en quête d’un animal sauvage à photographier (souvent en région grenobloise, parfois ailleurs).

Ce court article a pour but de vous présenter ma démarche ainsi que quelques clichés issus de mon travail. Bonne lecture !

 

QU’EST-CE QUE LA CHASSE PHOTO ?


La photo animalière sauvage (ou chasse photo), consiste à étudier en amont une espèce animale pour pouvoir localiser ses lieux de vie, étudier ses habitudes et au final…prendre une photo.

Chaque photographe animalier aura à cœur de respecter une éthique pour limiter son dérangement sur les espèces qu’il observe. L’idéal étant de rester le plus discret possible pour ne pas effrayer l’animal et obtenir les clichés d’une attitude qui soit spontanée et « naturelle ».


On s’intéressera bien sûr aux nombreux mammifères qui nous entourent (chevreuil, renard, blaireaux, cerf élaphe, sanglier, chamois…), mais la photographie animalière peut aussi concerner les oiseaux, les amphibiens et les insectes.


Elle se pratique dans des milieux sauvages la plupart du temps (forets, montagne, champs, marais) mais est tout à fait envisageable à la maison si vous disposez d’un jardin au minimum ouvert sur le monde (et que vous aimez nourrir des oiseaux l’hiver).

La photo animalière requiert généralement 4 étapes de préparation qui relient le choix d’une espèce à la réalisation de la photo finale. En voici un bref résumé :

 

ÉTAPE 1 : JOUER AU NATURALISTE DEVANT SON ÉCRAN


On ne peut pas « improviser » la photo animalière (à moins d’avoir une chance phénoménale, mais dans ce cas, je vous invite à jouer au loto). Il est très important de choisir l’espèce qui vous intéresse en amont et de vous renseigner au maximum sur ses habitudes et ses lieux de vie.

 A cette étape, il n’est pas nécessaire de chausser vos bottes et d’aller sur le terrain. Une simple recherche sur Wikipédia ou l’achat de livres naturalistes feront l’affaire (la collection Delachaux et la revue Salamandre sont une mine d’informations utiles).

L’idée est de vous familiariser suffisamment avec une espèce pour pouvoir essayer de localiser sa présence sur une carte. Par exemple, on sait que les chevreuils fréquentent principalement les milieux bocagers (champs entourés de petits bois) à proximité des cultures.

Vous pouvez utiliser un outil de cartographie en ligne de type Google Maps (ou mieux : Géoportail, qui répertorie les cours d’eau) pour repérer autour des chez vous les zones qui vous paraissent les plus propices à l’observation de l’animal. Certains sites locaux comme Nature Isère référencent aussi les dernières observations classées par localité.

Vous avez trouvé ? Il est temps de vous mettre en route alors !

 

ÉTAPE 2 : REPÉRER LES TRACES SUR LE TERRAIN


Une fois sur place, vous pouvez parcourir la zone en définissant une approche autour des points d’intérêts (zone de nourrissage, proximité d’un cours d’eau, voie aménagée pour passer sous une route). Laissez traîner vos yeux un peu partout et notez systématiquement 3 éléments importants :

  • -La présence de « coulées » (petits chemins habituellement fréquentés par les animaux ou l’herbe est aplatie) et d’empreintes.
  • -Le marquage et les crottes (qui permettent de jauger le degré de fréquentation d’un secteur. Attention à ne pas confondre avec le chien de la voisine...la première étape vous aura permis de vous familiariser avec l’aspect de ce que vous cherchez)
  • -Les aménagements de passages (présence de boue sur les troncs pour le sanglier, poils restés accrochés sur un fil de fer barbelé pour les chevreuils, restes de plumes en évidence pour les renards…)


Les traces sont nombreuses ? vous êtes sûr que le secteur est fréquenté ? Alors passons à l’étape suivante.

 

ÉTAPE 3 : L’OBSERVATION


L’objectif est maintenant de vérifier si votre intuition est la bonne.

Équipé d’une paire de jumelles, restez à bonne distance d’un secteur si possible dégagé et notez les allées et venues de l’espèce que vous cherchez (généralement un secteur de nourrissage comme un champ, au lever du jour ou au couché du soleil). Vous en saurez un peu plus sur les habitudes des animaux locaux vous dérangerez moins quand le temps de la photo sera venu.


Une autre méthode d’observation très pratique consiste à investir dans un piège photo et à le laisser sur place. Il notera pour vous, jour et nuit, les allées et venues des espèces qui vous intéressent.

 

ÉTAPE 4 : LA PHOTO


Enfin ! Le moment que vous attendez est arrivé ! Vous connaissez votre espèce sur le bout des doigts ? Vous avez repéré un secteur propice et vous êtes sûr qu’il est fréquenté ? Sortez votre appareil !

Un boitier réflexe ou hybride avec un objectif de 400mm au minimum et une bonne sensibilité en basse lumière vous sera utile. Choisissez un cadre mettant en valeur l’animal et décidez vous sur les 2 méthodes habituellement privilégiées :

  • -LA BILLEBAUDE (ou l’approche), consiste à aller à la rencontre de l’animal en vous déplaçant le plus discrètement possible. Définissez à l’avance votre parcours, avancez le vent de face pour éviter que vos odeurs ne vous trahissent et camouflez vous le mieux possible (l’idéal étant les tenues de camouflages 3D qui vont font ressembler à un buisson.  Si vous n’avez pas envie d’aller jusque-là, des vêtements sombres, des gants et une cagoule feront l’affaire). Chut !


  • -L’ AFFÛT. C’est personnellement ma technique préférée car les risques de dérangement sont moindres. Il s’agit d’intégrer votre cachette dans l’environnement (une cabane construite avec des branchages par exemple). Choisissez bien votre cadre à l’avance, vous ne pourrez plus bouger ! Une fois prêt, il faudra attendre que l’animal vous passe devant le nez (quelques minutes si vous avez de la chance, plus probablement quelques heures, souvent jamais…). L’affut est surtout une épreuve de motivation personnelle, mais quand l’animal que vous cherchez depuis des jours arrive enfin, les heures d’attentes s’envolent d’un coup. 



 CONCLUSION : METTRE EN VALEUR LA BIODIVERSITÉ LOCALE


Plus qu’une passion, la chasse photo est aussi un moyen de redécouvrir ce qui nous entoure et de s’apercevoir qu’il n’est pas nécessaire de faire des milliers de kilomètres en avion pour s’émerveiller de la nature.

N’oubliez pas qu’en foret nous ne sommes pas chez nous. Par notre présence, par nos pas, par nos bruits, nous dérangeons les habitants d’un espace préservé qui se réduit de jour en jour.

Alors en silence et avec respect, prenez vos jumelles et vos chaussures, et allez découvrir cette nature si belle et si fragile ! Je vous souhaite de très belles observations !

 

QUELQUES IMAGES SUPPLÉMENTAIRES