L’étude des dialectes à Grenoble au sein du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique »
Publié par L'Ouvre-Boîte - Université Grenoble Alpes, le 12 décembre 2022 2.3k
Laboratoire GIPSA-Lab UMR 5216
L’étude des dialectes ou dialectologie, permet d’aborder les variations spatio-temporelles d’une langue. La dialectologie nécessite de s’intéresser à plusieurs disciplines scientifiques (linguistique, phonétique, histoire, géographie, ethnologie, botanique etc.) sur plusieurs époques afin d’appréhender la diversité des langues et les mécanismes de mutation sous-jacents.
Ces derniers siècles, les dialectes ont régressé en France notamment de par le manque d’enseignement scolaire ou familial et de par une volonté politique d’imposer la langue française comme seule langue unificatrice de la nation, laissant peu de place aux dialectes. Le statut des dialectes a changé durant la révolution française. Parler le corse, le breton, le basque, ou les dialectes germaniques était considéré par certains députés, tels B. Barère de Vieuzac ou l’Abbé Grégoire, comme un acte terroriste contraire à « une république une et indivisible ». Pourtant une langue reflète l’environnement et la culture, les dialectes sont partie intégrante de l’identité de leurs locuteurs.
Au sein du laboratoire GIPSA-Lab, Carole Chauvin-Payan, ingénieure, est responsable technique du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique » ; Giovanni Depau enseignant-chercheur UGA en est le responsable scientifique. Ce plateau technique dédié à l’acquisition, au traitement et à l’analyse de données linguistiques et/ou ethnographiques se présentant sous forme textuelles, audio et audiovisuelles est constitué d’une une collection de 448 volumes d’atlas linguistiques portant sur les dialectes du monde entier (Europe : France, Italie, Suisse, Roumanie, Espagne, Portugal, particulièrement sur les domaines linguistiques romans: galicien, canarien, wallon, sarde, corse… Amérique Latine : Brésil, Colombie, Paraguay et certaines exceptions non romanes : Bretagne celtique, Pays Basque, USA, Crète, Tunisie, Kabylie...), de matériel d’enregistrement audio et audiovisuel et d’outils de cartographie tel que ShinyDialect[1].
Le personnel dédié (2 ingénieurs d’études et 2 enseignants-chercheurs) à ce plateau technique a plusieurs missions 1) élaborer des protocoles de traitement et d’analyse de données linguistiques, géolinguistiques et ethnographiques, 2) traiter et analyser des données linguistiques, géolinguistiques et ethnographiques, 3) former les universitaires (étudiants, chercheurs ou enseignants) à l’utilisation de ces protocoles de données et à la manipulation d’outils cartographiques, 4) sensibiliser, transmettre, rendre accessible aux publics spécialistes et non spécialistes les résultats des travaux menés en dialectologie et ethnographie et ceci au travers d’expositions, visites, conférences[2] et sites web comme Cartodialect[3]. Chaque année, le plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique » accueille des particuliers, stagiaires, doctorants et doctorantes, chercheurs et chercheures ainsi que d’autres scientifiques internationaux.
Élodie, étudiante sur les désignations dialectales françaises des plantes
En deuxième année de master de linguistique, Élodie réalise son mémoire sur Le nom des plantes médicinales dans l’aire gallo-romane. Au sein du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique », elle consulte les atlas comme base documentaire durant l’entièreté de ses 6 mois de stage.
S’étant d’abord intéressée aux différentes désignations du thym, elle a ensuite élargi ses recherches à plusieurs autres plantes médicinales : le serpolet, le basilic, la sauge et le romarin. L’étude des désignations d’une espèce de plante commence par une bibliographie pour connaître son nom scientifique, son ou ses noms usuels et ses différentes propriétés (astringente, hémostatique, aromatique etc.) qui pourraient expliquer les origines de certaines désignations dialectales. En effet, les noms dialectaux découlent souvent d’une particularité remarquable, une caractéristique saillante de la plante, c’est ce que l’on appelle la motivation sémantique.
Dans les plantes étudiées par Élodie, le serpolet et le thym sont désignés par une vingtaine de noms différents, tandis que le romarin n’a que 3 noms. L’intérêt est de savoir pourquoi ces cinq plantes sont nommées ainsi. Grâce aux recherches bibliographiques, des liens de causalité se forment entre les connaissances scientifiques de la plante et ses noms. L’étude des dialectes est donc transdisciplinaire car elle se base sur une bibliographie vaste et scientifique : histoire, chimie, botanique, ethnologie etc. Par exemple, il est nécessaire de se renseigner sur les molécules odorantes (cycles aromatiques) en cause dans l’odeur d’une plante, qui se reflète dans le nom de cette plante. Élodie recherche donc beaucoup d’informations qu’elle regroupe sur un fichier Word et parfois par écrit, avant de les ordonner et de rédiger certains paragraphes ou chapitres de son mémoire. Elle crée, ensuite, des cartes avec ShinyDialect à partir des analyses étymologiques, analyses géolinguistiques et sémantiques résultant de ses recherches documentaires et des traitements de données qu’elle a réalisés.
L’outil cartographique ShinyDialect (http://lig-tdcge.imag.fr/shiny/ShinyDialectV1_2_10/) a permis d’améliorer les techniques d’élaboration et d’édition de cartes linguistiques via une interface adaptée. Ce qui auparavant était long et laborieux sur Adobe Pro, est, aujourd’hui, plus efficace. Cet outil récupère les données géographiques (longitude, latitude) et les données dialectales implémentées sur un tableur Excel pour en effectuer le traitement qui permet ensuite la réalisation de cartes géographiques selon 6 étapes intuitives. ShinyDialect peut ainsi éditer des cartes vectorielles présentant la distribution aréale (géographique) des étymons ou des désignations relatives à une plante.
À la suite de son master, Élodie aimerait pouvoir poursuivre ses travaux en thèse et mettre en place ses propres enquêtes de terrain pour recueillir des données actuelles sur tout le territoire de la France métropolitaine (incluant la Bretagne et la Corse de l’aire gallo-romane) concernant les plantes aromatiques et médicinales.
Leotrim, étudiant sur les désignations dialectales albanaises des animaux et du climat
Leotrim, en licence de sciences du langage, travaille sur les différents dialectes albanais pour son mémoire de stage. C’est en cours de langues régionales qu’il a eu écho du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique ». Il était très intéressé pour y réaliser son stage, notamment pour se tourner vers la recherche dans les années à venir. En Albanie, il y a deux grands dialectes : le tosque parlé majoritairement dans le sud du pays et le guègue, parlé au Nord et dans les pays voisins. Originaire du Kosovo, Leotrim s’est tourné vers l’étude de son dialecte maternel, le guègue. Pour ses recherches, il s’appuie sur l’atlas phonétique et sur l’atlas lexical, publié respectivement en 2007 et 2008. Puis, une fois toutes les informations reprises dans un tableur, Leotrim réalise des cartes linguistiques présentant la distribution aréale (répartition géographique) des noms d’animaux ou de termes sur le climat, en se concentrant sur la motivation sémantique.
Comme anecdote, Leotrim cherchait l’origine du nom de la belette en guègue, car il existe une légende autour de cet animal. Malheureusement il avait quelques difficultés à aiguiller ses recherches étymologiques. En interagissant avec sa mère, parlant couramment le guègue, Leotrim a pu obtenir les informations manquantes : comme en français, le terme guègue de belette signifie « petite belle ».
Emmanuel, étudiant sur la prononciation spatio-temporelle du franco-provençale
Suite à ses études de géologie et de géographie, Emmanuel termine son master2 de linguistique par son stage au sein du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique ». Il croise les données de prononciations du franco-provençal provenant d’atlas de différentes époques, avec la phonétique historique. Sa spécialisation est dans la diphtongaison des voyelles originelles antérieures, perdues en France mais conservées dans le Val d'Aoste en Italie et dans le Valais en Suisse ainsi qu’utilisées dans le français québécois.
L’atlas linguistique étudié par Emmanuel possède une version papier (enquêtes 1904-1907 et publié en 1925) et une version numérique en complément des glossaires. Il s’intéresse à l’alphabet phonétique ancien et le traduit en alphabet phonétique international (IPA). Il peut ensuite comparer les prononciations en fonction de son tableau de localités avec certaines phrases prononcées. L’atlas étudié par Emmanuel est inédit car il combine l’écoute de deux enquêteurs pour transcrire ce qui était prononcé. En bas des pages de chaque volume se trouve parfois un tableau avec des annotations sur la divergence entre les deux versions des enquêteurs. Le but était de connaître la prononciation, ce qui est idéal pour l’étude phonétique d’Emmanuel.
Pour son sujet de mémoire, Emmanuel étudie la répartition spatio-temporelle du franco-provençal. Il se concentre entre autres sur [i] long et le [i] court et pour lesquels il identifie les zones de changement de prononciation de l’un à l’autre et vice-versa sur les cartes de 1904 à 1907. Il réalise la même étude sur le support audiovisuel Aval qui répertorie les prononciations actuelles. Emmanuel se concentre donc sur l'évolution de la prononciation du latin dans le temps et sur les variations de prononciations locales pour une même époque.
Maguelone, assistante-doctorante à l’université de Neuchâtel, étudie le genre grammatical du franco-provençal
Maguelone s’est spécialisée en linguistique durant ses études, en premier lieu sur le latin à l’université de Paris IV puis de Toulouse. Elle s’est ensuite tournée vers l’occitan, langue enseignée par son père à Toulouse et qu’elle parle couramment. Aujourd’hui, assistante doctorante au centre de dialectologie de Neuchâtel, elle consulte en symétrie les atlas portant sur l’occitan et coordonne les fiches linguistiques afin de pouvoir les étudier et former des cartes à l'avenir.
Doctorante, Maguelone concentre ses études sur le genre grammatical en occitan. L’intérêt des linguistes s’est porté sur les similitudes avec les prononciations d’autres langues. Beaucoup d'études amènent à un consensus linguistique (tels que les tableaux phonétiques d'Emmanuel) sur la prononciation du francoprovençal, mais la grammaire était bien moins étudiée. Maguelone étudie le raisons de l’existence des genres et des marques des genres en occitan. En effet, certaines langues se passent de genre masculin, féminin et neutre. Pourquoi existe-t-il des genres en occitan ? Le français gomme à l'oral les différences (joli/jolie) et l’italien a une terminaison spécifique pour chaque genre, le féminin se terminant par « a » et le masculin par « o ». L’occitan, lui, marque bien le féminin mais pas le masculin : Pourquoi les genres sont marqués de cette manière en occitan ? Il reste beaucoup d’études à mener pour apporter ces réponses.
En plus de cette étude, Maguelone s’intéresse aux différences de traitement des dialectes entre la France et la Suisse. En Suisse, le multilinguisme prégnant permet à chacun et chacune de comprendre l’importance des langues dès le plus jeune âge et de s’impliquer dans les dialectes. La normalisation de la langue française alliée à son unicité à l’école primaire limite la diffusion et la compréhension des langues et de leurs racines.
Quentin, doctorant sur la définition spatio-temporelle des dialectes occitans
Suite à un Master en physique théorique entre Marseille et Montpellier, Quentin a commencé à travailler à la Casemate de Grenoble jusqu’en 2017. Il a ensuite repris ses études en licence de langues, littératures et civilisations étrangères et régionales (LLCER) occitanes de Montpellier. C’est à ce moment-là que son enseignant l'a poussé à poursuivre la linguistique et la phonétique. Actuellement doctorant à l’université Paul Valéry de Montpellier, Quentin s'est souvent déplacé au du laboratoire GIPSA-Lab pour consulter les atlas linguistiques du plateau technique. Durant son premier semestre (de septembre à décembre), il était de la langue aussi vacataire à l’UGA pour enseigner l’occitan aux étudiants de licence de Lettres modernes et d’ERASMUS.
Aujourd'hui Quentin essaie d’observer et d’analyser comment les nouvelles approches de la phonétique auto-segmentale (segments sonores dans les mots) peuvent éclairer la variation diatopique (variation dans l'espace). Son étude porte uniquement sur l’état actuel de l’occitan (étude synchronique) de l’occitan, sachant qu’aujourd’hui l’occitan compte de 400 000 à 1 000 000 de locuteurs et locutrices. Ses données les plus anciennes ont une cinquantaine d’années, il part du postulat que la langue n’a pas beaucoup évoluée en un demi-siècle et qu’elle est semblablement la même aujourd'hui. Les parlés de référence établis par son enseignant sont des repères pour Quentin, lui permettant de comparer les fonctionnements locaux de l’occitan. Il émet ensuite des hypothèses sur l'évolution à venir de cette langue, telles que la représentation croissante des diphtongues.
Pour sa thèse, Quentin part de la théorie des éléments selon laquelle tous les sons sont composés de plusieurs éléments qui peuvent varier et se diffuser. Cette théorie amène des problématiques : qu'est-ce que l'occitan, est-ce une langue à part entière ? Comment sont définies des langues qui ne sont pas délimitées, sont-elles soumises à des codes précis ? En effet, le dialecte occitan parlé par le grand-père de Quentin était tout à fait compris par les catalans lors de son passage en Catalogne étant jeune.
Il est nécessaire de définir ce qu’est une langue et un dialecte en France ou a minima reconnaître l'existence de toutes les variations linguistiques pour quitter le flou juridique actuel. L’importance de la linguistique est sous représentée en France de nos jours, expliquant l’efficacité d’apprentissage en autodidacte plutôt que par un cadre scolaire ou universitaire. Pourtant jusqu’à la première guerre mondiale, les français standard n’était que très peu parlé sur le territoire français : les soldats avaient d’ailleurs des difficultés à comprendre les ordres de leurs supérieurs.
Carole Chauvin-Payan, responsable technique du plateau technique Géolinguistique & Ethnolinguistique »
Après avoir suivi un cursus universitaire en sciences du langage à l’université Stendhal, Carole Chauvin-Payan a soutenu un doctorat en 1999. Suite à ce doctorat, qui portait sur l’analyse linguistique et gestuelle des jeux et des préludes de jeux enfantins pratiqués dans les établissements scolaires de la région Rhône-Alpes, elle est recrutée par concours externe à l’université Stendhal comme ingénieure d’études Bap D. En 2000, elle intègre le Centre de dialectologie et se focalise sur l’élaboration d’une base de données ethnographique relative à l’agriculture et sur l’étude du lexique dialectal relatif aux animaux et aux plantes. En 2008, le Centre de dialectologie intègre la laboratoire GIPSA-Lab et de fait Carole est détachée au service Plateformes du laboratoire et travaille avec les enseignants et chercheurs de l’équipe Systèmes Linguistiques et Dialectologie (SLD), devenue aujourd’hui l’équipe Systèmes Linguistiques, Dialectologie et Oralité (SYLDO). En 2012, elle coordonne, avec les enseignants-chercheurs de l’équipe VSLD, la création de la plateforme « Atlas linguistiques » recatégorisée, aujourd’hui, en plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique ».
Elle participe à différents projets de recherche, tels que le PEPS HumaIn « Cartodialect », le labex exploratoire Persyval « Geodialect », l’ANR « ECLATS » (https://anr.fr/Projet-ANR-15-CE38-0002 et l’Atlas Linguistique Roman (ALiR) pour lesquels elle effectue le traitement et l’analyse linguistique et géolinguistique de données dialectales issues de l’Atlas Linguistique de la France (ALF)[4].
Il s’agit du plus vieil atlas linguistique de France, réalisé par J. Gilliéron et E. Edmont entre 1897 et 1901 et publié de 1902 à 1910. Les enquêtes de terrain ont été réalisées par l’enquêteur Edmond Edmont dans 638 communes de la France auprès de 735 informateurs (603 hommes et 102 femmes) avec un questionnaire de mots, de groupes de mots ou de phrases. Ce questionnaire portait essentiellement sur l’agriculture, les animaux d’élevage ou domestiques, la flore sauvage, le corps humain, les maladies et les phénomènes atmosphériques. Les réponses dialectales obtenues par E. Edmont ont été retranscrites avec l’alphabet phonétique Rousselot-Gilliéron. Les limites de cet atlas sont l’existence :
• d’un unique enquêteur dont dépendait la transcription des réponses dialectales,
• une disparité entre les informateurs / informatrices ayant un métier tertiaire et les thématiques rurales du questionnaire,
• une absence de parité entre hommes et femmes interrogées : 102 femmes et 633 hommes,
• la présence de confusions dans les réponses dialectales relatives aux plantes sauvages, confusions apparaissant lorsque le support du questionnaire était un herbier.
Malgré ces limites, il n’en reste pas moins que l’ALF est d’une part, un patrimoine matériel remarquable publié dans une collection de 12 volumes et, d’autre part, un patrimoine immatériel rare présentant les mots et les sons des dialectes gallo-romans de France à la fin du XIXe siècle. Cet atlas constitue, par ailleurs, une base de données conséquente contenant 1925 cartes et 639 points d’enquêtes par carte, soit un potentiel d’1 226 880 données dialectales. Aujourd’hui, seules 10 copies complètes de l’ALF subsistent en France dont 2 sont conservées au sein du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique ». Une copie plus abîmée est consultable sur place. La deuxième copie, qui a été restaurée, est précieusement gardée. La totalité des cartes de l’ALF a été numérisée et mise en ligne dans le cadre de l’ANR « ECLATS ». Chacune des 1925 cartes de l’atlas linguistique de France peut être visionnée ou téléchargée sur l’application Cartodialect (http://lig-tdcge.imag.fr/cartodialect5/#/) avec des outils de requête permettant de les trier par intitulés, par thématiques (habitat, faune, flore…), par catégorie grammaticale ou par numéro de carte.
Actuellement, les travaux menés par Carole portent sur le traitement et l’analyse des noms vernaculaires, des usages domestiques, alimentaires, médicinaux et des croyances populaires liés aux champignons et aux plantes de France et d’Europe. Pour ce faire, elle effectue le traitement et l’analyse des désignations dialectales des plantes répertoriées dans l’Atlas Linguistique de France (ALF), dans les Atlas Linguistiques et Ethnographiques de la France par Régions, ainsi que dans l’ouvrage Flore populaire d’Eugène Rolland[5].
Dans l’article Étude lexicale et aréale des désignations du pissenlit en domaine gallo-roman de France[6], Carole Chauvin, première autrice, analyse l’origine des noms vernaculaires du pissenlit sur le territoire français au XIXe siècle. Par ailleurs, elle montre l’existence d’un grand nombre de dénominations utilisées pour la désignation du pissenlit, preuve d’une variation linguistique importante. Enfin, elle décrit les usages alimentaires et médicinaux du pissenlit reflétant les relations étroites existant entre les hommes et les végétaux jusqu’au début du XXe siècle.
Enfin, dans le cadre de futurs projets de recherche portant sur l’architecture, l’habitat, les matériaux de construction, ainsi qu’à la production et les usages alimentaires des plantes et des champignons, Carole Chauvin projette d’effectuer le traitement et l’analyse des données dialectales et ethnographiques présentes dans les Atlas Linguistiques et Ethnographiques de la France par Régions.
Depuis l’ALF, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a publié un atlas des dialectes par régions culturelles de France 50 ans après l’Atlas Linguistique de France : les études spatio-temporelles sont donc possibles. Des études de terrain actuelles feraient le lien entre l’évolution de ces dialectes, comme la connaissance des termes adéquats pour les techniques et outils de différents métiers (charpentier etc.).
Jean-Pierre Lai, responsable technique du plateau technique « Phonétique historique »
Jean-Pierre Lai est responsable technique du plateau technique « Phonétique historique » et référent de la bibliothèque Recherche de dialectologie. Il est, par ailleurs, responsable des enregistrements sonores de dialectologie du plateau technique « Géolinguistique et Ethnolinguistique ». Tout comme Carole Chauvin-Payan, il travaille sur les atlas linguistiques en réalisant notamment des synthèses nationales et/ou romanes pour l'Atlas Linguistique Roman, projet européen du GIPSA-Lab, dirigé par E. Carpitelli et M. Contini. Le prochain volume, à paraître, est consacré aux plantes sauvages, celui d’après portera sur le thème des phénomènes atmosphériques. Les synthèses romanes rassemblent les travaux de tous les collègues européens travaillant dans ce projet et ayant réalisé une synthèse nationale sur le thème choisi.
En arrivant au centre de dialectologie, Jean-Pierre s'est avant tout concentré sur la linguistique de la moitié nord de la Sardaigne, en réalisant une thèse sur l'intonation du parler de Nuoro. Aujourd’hui, il s'occupe entre autres, d'enregistrements sonores anciens se présentant sous forme de bandes magnétiques. Il s'agit des enquêtes dialectales (250) réalisées par le prof. M. Contini dans les années 1960-1980. Le projet lancé par Giovanni Depau est d’extraire, à partir de ces bandes portant sur la langue sarde, des ethnotextes qui n'ont encore jamais été publiés et de les mettre à la disposition du public. Il s'agira de transcrire en phonétique les enquêtes et de les traduire ensuite en italien et en français dans le cadre de la publication d'un livre. en sarde avec Giovanni Depau. Parfois la transcription du sarde est difficile, bien que tous les deux soient locuteurs.
Jean-Pierre a par la suite pris en main le travail de Gaston Tuaillon, qui a fondé le Centre de Dialectologie de Grenoble (CDG) dans les années 80 jusqu’en 2008 où le CDG intègre le laboratoire GIPSA-Lab . G. Tuaillon a réalisé des enquêtes de 1955 jusqu'en 1982 sur tout le domaine franco-provençal. Son questionnaire possédait aussi des dessins, permettant d’éviter de diriger la personne interrogée : les locuteurs prononçaient directement le mot dans leur dialecte avec leur prononciation plutôt que de calquer celle de l’enquêteur.
Le ReVox a été utilisé afin de numériser l'ensemble des bandes magnétiques du francoprovençal et du sarde. Pour pouvoir transformer le format analogique en format numérique il est nécessaire de disposer d'un logiciel adapté (Audacity par exemple).
Sur les appareils UHER 4000, par exemple, 3 vitesses de déroulement de la bande magnétique existent (2,4cm/s, 9,5cm/s et 19cm/s) mais quelques fois sur les REVox seules 2 vitesses sont disponibles, ce qui rend difficile le reversement de l’analogique au numérique. Pour l'anecdote, plusieurs ReVox plusieurs ReVox ont brûlé, il y a toujours un risque car ce sont des appareils qui chauffent lors de leur utilisation.
Les études de terrain ont après été enregistrées sur MiniDisc.
Par la suite, les enregistreurs numérique Marantz-Zoom ont été utilisés,
la carte à puce a remplacé désormais la bande magnétique et le disque.Par la suite, les enregistreurs numérique Marantz-Zoom ont été utilisés,
la carte à puce a remplacé désormais la bande magnétique et le disque.
Enfin l’équipe de dialectologie utilise aujourd'hui des enregistreurs TASCAM avec 2 micros par appareil.
Jean-Pierre est également responsable de la bibliothèque de dialectologie, au RDC au Rez-de-chaussée du bâtiment Stendhal, aile C. Elle est fermée au public mais beaucoup d'ouvrages sont autorisés à la consultation. Attenante à cette dernière se trouve la salle Théodore Rosset, appartenant aussi à GIPSA-lab et qui, en plus d'être un musée de phonétique (appareils anciens retraçant l'histoire de la phonétique à Grenoble) tient aussi lieu de salle de cours. Elle contiendra à l'avenir une nouvelle Plateforme recherche et enseignement sur la phonétique historique. Le but étant de rassembler l'ensemble des ouvrages du prof. A. Duraffour, ancien membre de l'Institut de Phonétique de Grenoble, dont beaucoup de livres possèdent des annotations manuscrites très importantes et mériteront un travail de récupération.
Dans un avenir très proche, les salles 003 et 006 -toujours dans le même couloir- seront données en échange d'un déménagement de nos locaux du deuxième étage du bâtiment C Stendhal.
Les dialectologues publient depuis 1984 une revue : Géolinguistique, (aujourd'hui celle du laboratoire GIPSA-Lab). Elle est dirigée par E. Carpitelli, G. Depau, J-Pierre en est le rédacteur en chef. La revue a été classée en 2019 au rang A par Erhi-Plus (European Reference Index for the Humanities). Elle est en ligne depuis cette date et en outre elle est la seule publication en Europe portant sur la géolinguistique.
Giovanni Depau, référent scientifique de la plateforme Atlas linguistiques
Giovanni Depau est maître de conférences en dialectologie romane à l'Université Grenoble-Alpes et membre du laboratoire GIPSA-Lab. Il s’intéresse en particulier aux questions de contact linguistique en contexte diglossique et pour cela, il a deux axes de travail principaux. Il se focalise d’une part sur la Sardaigne et la relation entre sarde (langue de minorité historique) et italien (langue officielle) et d'autre part sur la tradition de la dialectologie grenobloise et en région alpine ainsi que la relation entre français et francoprovençal.
Giovanni vise à développer et valoriser la recherche et l'enseignement de la géographie linguistique et de la linguistique de terrain, à travers la participation et la direction de projets portant sur l'analyse de données et sur l'emploi de nouvelles technologies pour la valorisation de la recherche dialectale.
[1] http://lig-tdcge.imag.fr/shiny/ShinyDialectV1_2_10/
[2] Podcast Atelier Science infuse n°191 par C. Chauvin-Payan : Des mots et des choses https://videos.univ-grenoble-alpes.fr/recherche/science-infuse/video/25482-atelier-n191-des-mots-et-des-choses/
[3] http://lig-tdcge.imag.fr/cartodialect5/#/
[4] J. Gilliéron & E. Edmont (1902-1910) Atlas Linguistique de la France
[5] E. Rolland (1908) Flore populaire ou histoire naturelle des plantes dans leurs rapports avec la linguistique et le folklore, Paris, V. VII.
[6] https://studialinguisticaromanica.org/index.php/slr/article/view/42/70