Être innovateur et montagnard à Grenoble
Publié par Thomas Vuillaume, le 10 février 2014 4.2k
Thomas a rencontré Timothée, ingénieur et passionné de parapente qui a créé Le BipBip, "un variomètre solaire miniature" et créé sa start-up pour le commercialiser.
Grenoble, le techno-hub français, est au coude à coude avec San Francisco dans le classement des villes les plus innovantes du magazine américain Forbes (respectivement 5e et 3e). Mais le cœur des Alpes diffère de la Silicon Valley de par sa localisation particulière. Ici, on pratique les nano-tech la semaine et les sports de montagne le week-end. Alors forcément, cela influence les innovateurs de la vallée.
C’est le cas de Timothée Manaud, Tim pour les copains, qui a quitté Bordeaux en 2004 pour venir faire ses études à Grenoble. Après un parcours chancelant entre études et expériences en entreprise, Tim décroche un diplôme d’ingénieur à Polytech Grenoble en 2010 et trouve un poste dans une grande entreprise industrielle locale. Mais ce qui l’a toujours motivé, ce sont les nouvelles technologies et les nouvelles idées. Et des idées, il en a à revendre. Inspiré par sa passion pour le parapente, il invente en 2011 « Le BipBip » et monte alors sa start-up, bien décidé à conquérir le monde. Le BipBip, « c’est un variomètre solaire miniature » nous explique t-il.
« Un variomètre est un appareil dont les parapentistes sont très friands. » Pour le comprendre, il faut savoir que le but d’un parapentiste, c’est de monter en utilisant les courants d’air ascendants. C’est là que le variomètre intervient. En détectant les changements de pression, qu’il interprète par des changements d’altitude, il va le signaler au pilote par un signal sonore. Des « bips », plus ou moins espacés suivant la vitesse ascensionnelle. D’où le nom, Le BipBip. La véritable innovation de Tim est d’avoir intégré tout ca dans un minuscule boitier de seulement 5cm sur 3cm, alimenté par un panneau solaire. « Il est léger et on ne se soucie plus de le recharger la veille ! Le mien est toujours accroché à mon casque ».
Monter sa boite, une entreprise difficile ?
Tim n’a pas immédiatement eu l’idée de commercialiser son joujou. Au départ, c’était juste pour bricoler son propre variomètre. « Ceux de l’époque étaient trop gros, chers, et pas toujours très réactifs » confit-il, alors pourquoi pas fabriquer le sien ? Il y passera une partie de ses économies, et la plupart de ses week-ends, mais toujours par passion et envie. Seulement, il se rend compte que pour obtenir des échantillons pour son prototype, il vaut mieux se présenter comme une start-up auprès des autres entreprises. Et ses amis parapentistes lui glissent à l’oreille qu’eux aussi aimeraient bien avoir un gadget comme le sien ! Il profite alors du statut d’auto entrepreneur qui lui permet de garder son poste en CDI et de bénéficier des avantages que procure une entreprise : facilité de discussion avec des entreprises tierces et facturation.
Mode d'emploi du BipBip :
Fabrication des cartes électroniques :
A force d’améliorations de son prototype, Tim aboutit finalement à une version commercialisable du BipBip. Et entre temps, le mot a tourné dans le milieu du parapente grenoblois. Profitant de ce cercle privilégié, il peut faire une première commande pour 200 appareils sans prendre trop de risques. « Une étude de marché était hors de question d’un point de vue financier, il fallait se lancer sur un petit nombre et voir si ca marchait ». Et ca a marché. Aujourd’hui, ce sont plus de 1000 BipBip par an qui se vendent, dont la moitié hors de France ! Mais pour ca il a fallu quitté définitivement son CDI et monter une SARL pour dépasser les limitations du statut d’auto entrepreneur. « Ca me permet de payer les factures, pas vraiment d’en vivre, alors je garde d’autres activités à côté ». Tim est toujours consultant en électronique pour s’assurer un revenu confortable mais il a aussi d’autres projets à développer. Que ce soit des cartes son innovantes pour flippers ou un nouveau variomètre avec écran et GPS, les idées ne manquent pas !
Et si c’était à refaire ?
« Sans hésiter ! Quand on a une idée de projet et que l’on sent que ca peut marcher, il faut se lancer. Monter une petite entreprise, c’est surtout du bon sens et de la débrouillardise. En plus aujourd’hui, avec internet, il est facile de trouver de l’aide et de savoir si l’on va rencontrer un public réceptif à notre idée. Des sites comme “kickstarter.com” sont là pour ce genre de projet innovants ». Le message de Tim est clair, ne reculez plus !
>> Ilustration : Nicolas Hairon / Altitude Films