Au synchrotron de Grenoble, la source de rayons X la plus intense au monde, une équipe pluridisciplinaire, sponsorisée par la Fondation américaine Barnes, expertise les œuvres de Matisse, Ensor ou Van Gogh pour comprendre la détérioration du jaune de cadmium si cher aux peintres du début de la période moderne, et qui, au fil des ans, perd de son éclat, en virant au beige ou au gris. Parfois, il peut même se détacher de la toile.

Les physiciens ont ainsi identifié les processus de décoloration en incriminant d'abord le dessin préparatoire sous la peinture et compris finalement que les effritements et autres desquamations étaient aussi beaucoup liés aux conditions de conservation des tableaux.

Ce constat d'altération, s'il est un peu tristounet, pose la question de l'éternité de l'œuvre, et, presque philosophiquement, nous renvoie à notre propre éphémérité que la vanité nous fait souvent oublier. La Nature, même si nous la détruisons chaque jour un peu plus, nous remet à notre juste place par cette sorte de pourrissement.

Que dire de la peinture de Jean Michel BASQUIAT ?
Son délabrement m'avait déjà choqué en 1997 lors de l'exposition à la Fondation Maillol ...

... et était encore plus évident fin 2010 au Musée d'Art Moderne.

Pour moi, le problème est réglé : il ne reste pratiquement plus rien de ce que j'ai peint dans mes jeunes années. J'ai cependant la chance de sortir vivant de la fulgurance de ces "années héroïne ".

Aujourd'hui, parce qu'il permet d'abord d'échapper à tout marché financier et face à la débauche agressive des images, un certain " Minimalisme Écologique " impose sa vitale sobriété même si elle est teintée de beaucoup de désespoir.

La non-production de nouvelles formes comme ultime tentative de préservation des espèces:

"Ne pas en rajouter" serait alors une forme d'abnégation, qui loin d'être un renoncement est plutôt une sorte de sobriété choisie visant l'amortissement du choc d'une civilisation fonçant droit dans le mur.

La Vie trop courte, l'éphémérité et la vitesse empêchent la trace, l'empreinte ou le souvenir mais, à contrario, laissent un sentiment d'inachevé … puis d'inutilité.