Comment se souvenir ?

Publié par La Casemate, le 6 octobre 2022   550

Depuis septembre 2019, RCF Isère offre du temps d'antenne à Echosciences Grenoble, tous les jeudis à 12h05, dans "l'Echo des médias" des "Midis RCF" présenté par Nicolas Boutry.  L'occasion de vous parler des derniers contenus intéressants partagés par les membres d'Echosciences. Retrouvez toutes les chroniques dans ce dossier ou sur le site de RCF-Isère !

La chronique du 6 octobre 2022, par Jonathan Bazin, en son et en texte ci-dessous :

Sur RCF Isère, c’est l’heure de retrouver l'Écho des médias. Aujourd’hui, nous accueillons Jonathan Bazin, directeur du développement à La Casemate. Vous allez nous présenter les dernières nouvelles d’Echosciences Grenoble. Bonjour Jonathan !

Bonjour Nicolas !

Alors pour votre première venue ici, on va parler mémoire ? 

Oui, nous allons tenter, en quelques minutes d’en comprendre un peu mieux les fonctionnements en se plongeant dans les méandres de notre incroyable cerveau. L’article intitulé “Comment se souvenir?”  publié sur Echosciences a attiré mon attention. Il s’appuie notamment sur les travaux de Lionel Naccache qui est neurologue et chercheur en neurosciences.

Et il permet de comprendre pourquoi on se souvient et comment on se souvient ? 

Oui, en partie du moins: un des phénomènes est celui de la spatialisation de la mémoire : les neurones associent des contenus à des lieux. 

Vous l’avez peut-être déjà testé : Vous apprenez mieux en associant des contenus à des paysages. Et en effet, dans l’hippocampe de notre cerveau, il y a des neurones de lieux, des sortes de GPS mentaux. 

Et la nuit, pendant qu’on dort on refait les parcours de la journée à toute vitesse. Cela permet de consolider les souvenirs qu’on a vécus car on associe l’espace et la mémoire. 

Pour apprendre un très long texte : une des méthodes, c’est de rejouer mentalement une promenade dans un lieu, une rue que vous connaissez extrêmement bien et à chaque enseigne, à chaque pierre, à chaque étape, vous posez un bout de texte, un souvenir et ça va nous aider justement à nous souvenir. 

C’est déjà extraordinaire mais vous dites qu'au-delà de ce phénomène, les bons et les mauvais souvenirs sont triés par le cerveau, comment est-ce possible ? 

Oui, tout à fait, une molécule dont le petit nom est “neurotensine” sert pour ainsi dire d’interrupteur et donne une connotation positive ou négative aux émotions et aux souvenirs. 

On est un peu dans le film Vice Versa, là non ? 

Et bien en fait, étonnement, on en est pas si éloigné. Rappelez vous, dans ce dessin animé, on se retrouve dans le cerveau d’un enfant qui contient des boules de verre teintées en fonction des émotions associées aux souvenirs. 

Comment les chercheurs ont-ils réussi à mettre en évidence ce type de phénomène ? 

Dans un premier temps, ils ont donné du sucre à des souris en diffusant un son, et de la quinine qui est amère en diffusant un second son, différent évidemment. 

A force de s’exercer, les rongeurs ont fini par bien comprendre que première mélodie égale à “je vais me régaler” et seconde mélodie égale à beuh!  

Mais comment ? 

Simplement car les souris salivaient d’avance en entendant la première et pas du tout en en entendant la seconde. 

L’expérience ne s’est pas arrêtée là, les chercheurs ont ensuite rendu inactif les gènes qui produisent la neurotensine et là, non seulement les souris étaient presque incapables de mémoriser le son associé au goût sucré mais l’apprentissage du signal menaçant s’en est trouvé accéléré. 

Et à l’inverse, en ajoutant de la neurotensine, les souris ont bondi comme des fusées au signal de récompense et n’ont pas semblé très concernés par l’alerte sonore du danger…

La question qu’on se pose évidemment : y a-t-il des applications possibles chez l’humain ? 

On l’espère mais ce n’est pas encore pour tout de suite.

Mais oui, en effet, cette découverte est susceptible d’ouvrir des perspectives pour des nouveaux traitements des troubles de l’humeur (comme la dépression ou l’anxiété) mais aussi à l’inverse pour traiter des addictions à des drogues. Le traitement pourrait alors permettre que le souvenir positif associé à la prise de drogue ne soit pas si intense.

Bref, la maîtrise de cette neurotensine pourrait devenir le futur couteau suisse de la santé mentale. 

Eh bien, merci Jonathan et à une prochaine fois. 

A bientôt, Nicolas! 

Liens : 

https://www.echosciences-grenoble.fr/communautes/memoires-du-futur/articles/comment-se-souvenir

https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/sous-le-soleil-de-platon/sous-le-soleil-de-platon-du-mardi-02-aout-2022-7092263

https://www.lemonde.fr/sciences/article/2022/08/03/la-neurotensine-cette-molecule-qui-trie-les-bons-et-les-mauvais-souvenirs_6136995_1650684.html

https://www.liberation.fr/sciences/biologie/comment-se-fabriquent-les-bons-et-les-mauvais-souvenirs-20220723_OP6PAAF7FFCRNHGGB5OIDNP73Q/?datawallToken=GFT-276f5218babb4879c1cc7386f2d753d5