Comment des animaux ou des objets plus lourds que l’air peuvent-ils voler ?
Publié par Encyclopédie Environnement, le 24 septembre 2018 4.5k
À en croire la mythologie grecque, Dedale, prisonnier du Minotaure, serait parvenu à confectionner des ailes en assemblant des plumes avec de la cire. Ceci lui aurait permis de quitter son exil crétois et de s’envoler jusqu’en Sicile. Mais son fils Icare, imprudent, se serait trop rapproché du soleil dont la chaleur aurait fait fondre la cire, provoquant sa chute dans la mer, désormais appelée la mer icarienne.
Du rêve d’Icare à la coupe Icare
Chaque année en septembre, la Coupe ICARE attire sur le plateau des Petites Roches, près de Grenoble, des dizaines de milliers de spectateurs. Ils viennent participer au plus grand festival mondial de sports aériens et admirer aussi bien l’imagination déployée par les participants pour décorer leurs voiles ou leurs montgolfières, que leur habileté à voler. Les parapentistes parviennent à se maintenir en l’air, à ralentir leur descente vers le sol, voire à s’élever dans les vents thermiques. Dans toutes les régions montagneuses il est maintenant courant de voir des voiles plus ou moins grandes, plus ou moins décorées, emporter dans les airs des hommes parvenus à réaliser ce rêve : voler comme les oiseaux.
Pour compenser le poids : la portance
En montagne, les randonneurs peuvent souvent observer le vol plané, apparemment sans effort, des vautours fauves. Mais en général, à la différence des parapentistes et de ces vautours en vol plané, les oiseaux battent des ailes, assez rapidement, pour se maintenir en l’air malgré leur poids et pour s’y déplacer. On comprend que chaque coup d’ailes vers le bas provoque à la fois un mouvement d’air vers le bas, c’est l’action, et un mouvement de l’oiseau vers le haut, c’est la réaction. Inversement, le retour des ailes vers le haut tend à faire tomber l’oiseau. Mais celui-ci, dès sa jeunesse, a appris à optimiser ces deux mouvements antagonistes, en rendant le mouvement d’aile vers le bas beaucoup plus efficace que celui vers le haut. Le bilan net des ces deux effets s’appelle la portance. C’est une force un peu mystérieuse pour nous humains qui n’en disposons pas naturellement, mais dont l’origine s’explique assez simplement.
Mais comment pénétrer dans l’air ?
Les oiseaux avancent, montent, plongent et virevoltent à leur gré. Maîtrisant bien les mouvements de leurs ailes, ils parviennent à donner une composante horizontale à la force qui s’exerce sur elles, vers l’avant pour avancer, vers l’un des côtés pour tourner. Si la portance sert à vaincre le poids, la composante horizontale permet de vaincre la résistance de l’air à l’avancement, que l’on appelle la traînée. Par bonheur pour les oiseaux, l’air est peu dense, il leur est possible de réaliser cette pénétration dans l’air au prix d’efforts relativement minimes, en tout cas à la portée de leur masse modérée, entre quelques grammes et une dizaine de kilogrammes.
La formation en V des oiseaux migrateurs illustre fort bien, à la fois leur savoir faire, puisque chacun est capable d’utiliser les efforts déjà consentis par celui le précède, et leur aptitude à réduire la traînée. L’astuce de chacun de ceux qui suivent le premier consiste à se placer légèrement en arrière d’une extrémité de l’aile qui le précède. En effet, là et seulement là il trouve un courant ascendant qui contribue à le porter. Toutes les ailes d’envergure finie ont en effet la propriété d’engendrer des tourbillons à leurs extrémités : ceux-ci sont bien visibles derrière les avions qui survolent une nappe nuageuse.
Dans l’eau c’est une autre affaire
L’eau est environ 800 fois plus dense que l’air, il est beaucoup plus difficile d’y pénétrer et de vaincre la traînée. Les animaux marins y parviennent, grâce à une morphologie adaptée et très différente de celle des oiseaux : à volume donné leur masse musculaire est plus grande et plus puissante, et, par ailleurs, leur forme profilée réduit la traînée. Les ondulations de leur long corps fuselé sont capables de les propulser vers l’avant. En outre, ils ont dans leur abdomen une poche gazeuse dont ils parviennent à ajuster la grosseur, ce qui leur permet d’ajuster leur poids. De plus en plus légers quand la poche grossit, de plus en plus lourds lorsque la poche se rétrécit, ils peuvent amener leur densité globale à être très proche de celle de l’eau, à s’élever, à plonger, ou bien à flotter, même avec de très petites nageoires, beaucoup plus petites que les ailes des oiseaux. Les navires et certains oiseaux comme les canards et les cygnes sont plus légers que le volume d’eau qu’ils déplacent. Bénéficiant donc de la poussée d’Archimède, ils n’ont aucun effort à faire pour flotter mais, pour avancer, ils doivent disposer d’une force motrice ou musculaire qui compense la traînée ; l’équilibre de ces deux forces opposées détermine leur vitesse.
Et qu’en est-il des avions ?
Depuis le début du 20e siècle, les hommes sont parvenus à construire des machines volantes. Des hélices d’abord, puis des réacteurs, ont permis de vaincre la résistance de l’air, mais il a fallu tourner une difficulté supplémentaire : comment engendrer une portance sans battre des ailes ? Les pionniers de l’aéronautique ont compris qu’en donnant à l’aile une certaine incidence, même faible, la pression exercée sur la face inférieure (l’intrados) dépassait celle exercée sur la face supérieure (l’extrados). Et la différence entre les poussées sur ces deux faces était proportionnelle au carré de la vitesse de l’aile. Dès lors, pour s’envoler, en théorie la solution était simple : il fallait rouler à une vitesse suffisante tout en donnant à l’aile une certaine incidence. Les progrès de ce qui devint l’aviation, une industrie aujourd’hui très rentable et devenue indispensable, ont été laborieux. Il fallut mettre au point des matériaux traités pour être à la fois légers et résistants, puis optimiser les formes des ailes et du fuselage. Au fil des décennies, les avions sont devenus de plus en plus performants et sûrs. Ceux qui traversent aujourd’hui les océans transportent chaque année des millions de passagers dans un grand confort. Et le nombre des décès lors d’accidents aériens, rapporté au nombre des passagers, est considérablement plus faible que le nombre des accidentés de la route.
Puisqu’aucun bienfait n’est gratuit, n’oublions pas de mentionner la pénalité de tous les moyens de transport (aérien, marin, routier) que constitue la consommation de carburants. C’est l’une des sources de gaz à effet de serre, donc l’un des facteurs du réchauffement climatique. Le vol en parapente ou en deltaplane, ne consomme que l’énergie du passager, mais sa portée est limitée à quelques kilomètres, d’un sommet vers une vallée voisine.
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Ce travail a été réalisé grâce au soutien financier d'UGA Éditions dans le cadre du programme "Investissement d'avenir", géré par l'Agence nationale de la Recherche.
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