Ces moustiques qui ont du flair !
Publié par Léa Lahmar, le 20 octobre 2019 2.2k
Crédit photo : ekamelev (Pixabay)
« Mais pourquoi je me suis encore fait piquer ? » voilà une phrase que nous avons l'habitude d'entendre lorsque les moustiques s'invitent dans nos soirées estivales. Le saviez vous ? Nos ennemis seraient capables de détecter directement l'odeur humaine grâce à des récepteurs présents dans leur « nez ».
L'attirance des moustiques envers les humains a soulevé de nombreuses questions dans le monde scientifique. Après avoir envisagé que la chaleur et le dégagement de CO2 par le corps humain puissent l'expliquer; il semblerait que le système de reconnaissance des moustiques soit bien plus fin que cela ...
Des chercheurs de l'université de Yale aux États-Unis ont récemment mis en évidence chez le moustique des récepteurs olfactifs sensibles à certaines odeurs humaines. C'est à dire de microscopiques cellules présentes à la surface du « nez » des moustiques, comparables à des interrupteurs sur lesquels certaines odeurs font pression ou non.
Lorsque qu'un de ces récepteurs détecte une odeur humaine, il transmet l'information vers le cerveau au niveau des neurones, qui sont alors fortement activés : on parle d'excitation neuronale. Ce processus déclenche une réponse comportementale du moustique : se diriger vers la source de l'odeur, nous !
Afin de mieux comprendre cette réponse olfactive, les moustiques ont été placés dans des boites fermées. Les scientifiques ont réalisé alors plusieurs séries de tests en injectant dans ces boites diverses odeurs connues. L'activité neuronale des moustiques a ensuite été mesurée grâce à de micro-électrodes directement connectées aux différents récepteurs des insectes.
Ces
expériences ont permis de mettre en évidence deux résultats
majeurs. Ce sont des récepteurs de la famille
des « AgOr » qui répondent le plus aux odeurs
humaines, principalement aux odeurs de sueur et de peau. Mais ces
récepteurs sont également capables d'émettre des réponses
de forte affinité face à notre odeur. En comparaison, la
réponse olfactive en présence d'odeurs de fruits est très faible.
Pour aller plus loin, l'équipe de chercheurs a voulu savoir comment les moustiques se comportaient dans un espace moins confiné, afin de recréer un environnement comparable à celui d'une maison par exemple.
Un odoromètre a été utilisé afin de localiser et mesurer l'intensité des odeurs dans l'espace. Ainsi, les réponses neuronales et comportementales des moustiques face à celles-ci ont été déterminées. Il faut imaginer une « carte des odeurs » sur laquelle les moustiques se déplaceraient selon l'endroit qui les attire le plus.
Là encore, les résultats renforcent les observations décrites précédemment. En réponse aux surfaces couvertes par des odeurs humaines, un plus grand nombre de récepteurs olfactifs sont activés. Contrairement aux zones où d'autres types d'odeurs sont présentes.
En plus de leur grande affinité pour l'odeur humaine, les moustiques pourraient également distinguer précisément notre odeur dans un environnement complexe. Ces expériences confirment finalement que les moustiques sont bien dotés d'un « radar à Humains ».
Heureusement, une activation sous-entend une inactivation. De nouvelles pistes sont aujourd'hui envisagées pour la mise au point d'« antagonistes » spécifiques : des molécules chimiques capables de bloquer les récepteurs « AgOr » des moustiques. Ces derniers pourraient être utilisés dans des sprays répulsifs. De quoi apaiser nos soirées d'été !
Des « moustiques OGM » contre la malaria
Les moustiques sont vecteurs de maladies comme la malaria, responsable de centaines de milliers de morts chaque année, notamment en Afrique subsaharienne (655 000 décès en 2010).
Dans la continuité de ces recherches, de nouvelles études tendent à créer une nouvelle espèce de moustiques dont les récepteurs olfactifs impliqués dans la reconnaissance de l'odeur humaine seraient inactifs ou absents. En quelque sorte, des « moustiques OGM », qui prendraient le dessus sur les espèces actuelles au fil du temps.
Des techniques issues de cette nouvelle découverte permettraient alors de réduire considérablement le taux de mortalité dû aux maladies transmises par les moustiques.