Art et technologie, un mélange créatif ?

Publié par Larissa Caudwell, le 7 juillet 2014   11k

A l’occasion de la présentation d’une étape de travail du groupe LoumiLa&PameLa, j’ai rencontré Ben, du collectif BenTo responsable de la numérisation du spectacle. Nous avons discuté de ce mariage subtil entre art et technologie.

Lorsque je pense au mariage entre art et technologie, cela m’évoque d’abord des dispositifs fixes plus ou moins provisoires, interactifs ou non, comme ceux de la Fête des lumières à Lyon. Mais la technologie peut aussi prendre part aux spectacles vivants, permettant de réaliser une mise en scène immersive ou innovante, voire de donner vie à des personnages fictifs.

Un exemple frappant a été la représentation de l’opéra The End de Keiichiro Shibuya1 à Paris en novembre dernier. Cet opéra, qui a la particularité de n’avoir aucun interprète vivant, met en scène la diva virtuelle Hatsune Miku (un logiciel de synthèse vocale dit Vocaloid) dans un spectacle visuel immersif. L’utilisation de ce personnage, considéré comme une icône musicale mondiale, était non seulement une innovation artistique mais aussi un élément central dans la thématique de cet opéra.

De même, le groupe LoudmiLa&PameLa souhaite utiliser la technologie pour plonger ses spectateurs dans le monde de son personnage fictif LoudmiLa, qui est aussi le centre de son univers musical. Il a alors fait appel au collectif BenTo, formé par le duo Benjamin Kuperberg et Antoine Costes. A l’occasion de la présentation de leur étape de travail à l’Espace Victor Schoelcher (Seyssins), j’ai rencontré Benjamin, dit Ben, un geek passionné de musique, qui m’a fait part de ses pensées sur l’art technologique.

Ben

En pratique, en quoi consiste le travail du groupe BenTo ? Quels sont vos outils ?

Une grande partie de notre travail consiste à développer des outils pour les artistes, afin de les rendre autonomes dans l’utilisation de la technologie. Cela passe notamment par la création d’interfaces informatiques et demande un soin particulier au niveau de leur ergonomie. Nous imaginons et créons aussi des installations interactives ou immersives. Il y a un enjeu particulier dans ces installations car il faut anticiper les réactions des visiteurs qui sont parfois inattendues. Et puis il y a la scénographie de spectacle où nous créons ou ajustons des technologies pour répondre à des idées artistiques, comme c’est le cas avec LoudmiLa&PameLa.

Pour tout cela, nous essayons d’être autant que possible indépendant de nos outils car chacun a ses limites. Nous utilisons donc beaucoup de logiciels différents (Adobe Air pour la création d’interfaces, Unity 3D, Java, Touch Designer…). Mais nous passons aussi beaucoup de temps à bricoler pour monter et connecter les différents éléments technologiques sur la scène.

Quel a été ton parcours ?

J’ai commencé par une école d’animation et d’effets spéciaux où j’ai appris le graphisme, la 3D et le développement web. Ensuite, j’ai débuté en freelance et j’ai collaboré avec une entreprise dans le développement de serious games. Au fil de nos collaborations régulières, nous avons monté The Curious Project autour des nouvelles technologies pour faire de l’événementiel (animations pour Roland Garros, Citroën…) et du serious game. Parallèlement, j’ai suivi une formation de direction d’orchestre. Puis en juillet dernier, nous avons quitté The Curious Project avec Antoine pour former BenTo. Nous voulions nous orienter vers des projets artistiques sans poser de contraintes financières. Aujourd’hui nous prenons part à différents projets, certains rentables, d’autres non.

Selon toi, art et technologie vont-ils de pair ?

Non ! Enfin, mettre de la technologie dans l’art paraît assez naturel, tout le monde s’y intéresse. Mais pour autant, la technologie ne sert pas toujours l’art. Il faut faire attention à l’effet "tendance". L’utilisation de la technologie doit être justifiée et avoir un sens.

Quelles sont tes inspirations ?

Je suis très peu de gens en particulier, mais je peux citer Memo Akten. Après, je suis plutôt des sites ou des projets. Il y a par exemple le projet Box, un projet qui utilise la technologie de mapping vidéo et joue ainsi sur les illusions d’optiques.

Quels sont tes projets pour la suite ?

Je souhaite me tourner de plus en plus vers le spectacle et devenir intermittent pour travailler avec différentes compagnies, dont Organic Orchestra, la compagnie d’EZRA. J’aimerais terminer ma formation de direction d’orchestre. Je compte aussi continuer à produire des installations autonomes et peut-être monter des ateliers d’apprentissage. En attendant un prochain concert, vous pouvez aider le projet à prendre forme en participant à notre campagne de financement sur Ulule.

>> Notes : 

  1. Visionnable ici