A la découverte d’une momie égyptienne de crocodile vieille de 2 000 ans

Publié par Esrf Synchrotron, le 20 septembre 2019   4.9k

Comment les anciens Égyptiens s’approvisionnaient-ils en cadavres d’animaux nécessaires à la confection des innombrables et aujourd’hui si populaires « momies» de chats, chiens, ibis ou crocodiles ? On savait déjà que nombre de ces animaux provenaient d’élevages spécifiques ou de ramassages de charognes. Dans le cadre du programme de recherche interdisciplinaire MAHES (Momies Animales et Humaines EgyptienneS) actuellement financé par le LabEx ARCHIMEDE, une équipe regroupant des chercheurs de l’Université Montpellier 3, du laboratoire CNRS « Archéologie des sociétés méditerranéennes » (UMR 5140), de l’ESRF, le synchrotron Européen de Grenoble, de l’American University du Caire et du musée des Confluences à Lyon, s’est penchée sur ces pratiques rituelles dont les momies animales étaient les objets.

 

Fig. 1 : Photo et rendu 3D de la momie de crocodile MHNL 90001591. Rendu 3D montrant une partie du contenu stomacal du crocodile ainsi que la fracture crânienne létale (© ESRF/Programme MAHES).
Fig. 1 : Photo et rendu 3D de la momie de crocodile MHNL 90001591. Rendu 3D montrant une partie du contenu stomacal du crocodile ainsi que la fracture crânienne létale (© ESRF/Programme MAHES).

Grâce à l’imagerie synchrotron et aux rayons X très puissants de l’ESRF, ils ont pu apporté la preuve que des crocodiles sauvages étaient chassés pour confectionner des momies en Égypte à l’époque romaine.  

Grâce aux technologies de pointe de l’ESRF, les chercheurs ont pu faire, sans l’endommager, une autopsie virtuelle de la momie de crocodile provenant de Kom Ombo (Haute Egypte) et vieille de plus de 2000 ans. Les chercheurs ont pu déterminer la cause du décès du crocodile (un coup unique porté à la tête) mais aussi la composition du dernier repas du crocodile, et sont même allés jusqu’à scanner les dents de la souris mangée par le crocodile.


Les chercheurs ont mis en évidence que ce jeune crocodile de 3 ou 4 ans avait été chassé alors qu’il vivait à l’état sauvage puis avait été rapidement momifié. Cette recherche, publiée en septembre 2019 dans la revue scientifique américaine Journal of Archaeological Science, ouvre de nouvelles perspectives concernant les pratiques liées à la momification des animaux en Égypte ancienne, pratiques qui s’avèrent être bien plus diverses que ce que considérait l’égyptologie jusqu’à présent.

Cette étude est un bel exemple de partenariat entre le Synchrotron Européen et le Musée Confluences et de l’importance de travaux interdisciplinaires Sciences – Science Humaines dans le domaine de l’archéologie.  

Avec la nouvelle source de rayonnement synchrotron actuellement en construction ESRF-EBS (le premier synchrotron au monde de 4ème génération à haute-énergie), prévue pour ouverture aux scientifiques en août 2020, les scientifiques pourront venir à Grenoble pour étudier des objets et fossiles encore plus gros comme une momie humaine complète, avec une qualité de détails renforcée.    

Paul Tafforeau, scientifique ESRF, paléontologue et Camille Berruyer, doctorante, sur la ligne BM5 de l'ESRF, lors de l'étude d'une autre momie.
Paul Tafforeau, scientifique ESRF, paléontologue et Camille Berruyer, doctorante, sur la ligne BM05 de l'ESRF, lors de l'étude d'une autre momie. @Pierre Jayet



Référence : Porcier, St., Berruyer, C., Pasquali, St., Ikram, S., Berthet, D., Tafforeau, P. 2019. Wild crocodiles hunted to make mummies in Roman Egypt: Evidence from synchrotron imaging. Journal of Archaeological Science 110 https://doi.org/10.1016/j.jas.2019.105009    

Cette recherche a été réalisée dans le cadre du programme MAHES (Momies Animales et Humaines EgyptienneS) financé par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme "Investissement d’Avenir" program ANR-11-LABX-0032-01 LabEx ARCHIMEDE, et par l’ESRF.