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Étienne Rolland, un peu plus près des aurores boréales

Publié par Geraldine Fabre, le 5 septembre 2019   1.8k

L'image est un peu cliché mais il n’est pas difficile d’imaginer Étienne Rolland, quand il était enfant l’œil rivé à son télescope, dans le jardin de ses parents à Saint-Vincent-de-Mercuze. Des étoiles, il en a aujourd’hui plein les yeux, surtout quand il parle du projet AMICal Sat sur lequel il travaille maintenant depuis deux ans. 

L’espace en ligne de mire

S’il a toujours voulu travailler dans le domaine du spatial, Étienne Rolland n’imaginait pas pour autant que ce serait dans sa région d’origine. Avec cet objectif en ligne de mire, son cursus entre Grenoble, Paris et Tucson (USA) ne manque pas d’atouts et dans ce secteur qui forme encore moins d’ingénieurs que nécessaire, il avait le choix pour son stage de fin d’études. Mais finalement, c’est au Centre spatial universitaire de Grenoble (CSUG) qu’il décide de se poser. De justesse. "J’avais accepté un autre stage la veille. Je n’avais même pas candidaté au CSUG, mais mon CV leur avait été transmis et ils m’avaient convoqué pour un entretien. Quand, à la fin, ils m’ont proposé le poste, je n’ai pas pu refuser." 

En mars 2017, Étienne intègre donc l’équipe du CSUG en tant qu’ingénieur système. Dès son premier jour, la réunion technique le plonge directement dans le bain et six mois plus tard, on lui confie le projet AMICal Sat, un nanosatellite pas plus gros qu’une brique de lait qui aura pour mission d’aller photographier les aurores polaires depuis l’espace. Un vrai défi car Étienne a moins de deux ans pour le réaliser, mais heureusement pas tout seul. 

Le défi AMICal Sat 

Depuis 2015, le CSUG, soutenu par de nombreuses entreprises mécènes via la Fondation UGA, forme des étudiants aux technologies du spatial miniaturisé, en les faisant participer à des projets de conception et de construction de nanosatellites. Sur le projet AMICal Sat, Étienne Rolland travaille donc avec une cinquantaine d’étudiants, issus d’écoles d’ingénieurs, d’IUT, de licence ou de master, en mécanique, optique, électronique… Tous pleinement investis car "au CSUG, que tu sois en projet ou en stage, tu es un membre de l’équipe" témoigne Étienne. 

Le projet est ambitieux, risqué voire un peu fou, pour réussir cette conception accélérée mais il passionne Étienne qui ne compte plus ses heures. "Souvent le soir, je me faisais mettre dehors par le gardien et je partais frustré parce que je n’avais pas fini tous les tests que je voulais faire." Perfectionniste et curieux, il ne laisse rien au hasard et creuse tous les sujets : "Je me sens toujours en formation. J’apprends tous les jours et j’ai toujours l’impression de pouvoir en faire plus, de pouvoir en savoir plus" avoue Étienne avec cette inquiétude toujours en tête : ne pas lancer une coquille vide dans l’espace ! Bien sûr, il faut qu’il fonctionne ce satellite : "Mais pas que pour moi, pour toute l’équipe" confie-t-il avec une grosse pression sur les épaules. 

Décollage imminent 

Le lancement a dû être repoussé. À trois reprises. Ce qui à chaque fois a permis à Étienne de continuer à peaufiner encore un peu plus son nanosatellite. Mais fin novembre, il a quand même fallu livrer la charge utile : un imageur composé d’une optique créée spécifiquement pour mesurer l’intensité des collisions de particules dans les aurores polaires. 

Parti en Pologne, cet instrument doit être intégré à la structure du nanosatellite par l’entreprise SatRevolution, avant d’être transféré en Russie pour un lancement depuis le cosmodrome de Vostochny prévu début juillet. Si tout fonctionne parfaitement, les premières données arriveront quelques jours plus tard. À quelques semaines du lancement, Étienne est donc un peu fébrile mais très impatient. "Dans le spatial, les projets durent parfois 10, 15 voire 20 ans. Ce n’est pas toujours possible de les suivre en entier. Avoir participé au projet AMICal Sat depuis le début et le mener à son terme, c’est une chance incroyable."

Un début et non une fin

Après le lancement, Étienne Rolland pense déjà à partir, probablement à l’étranger. Avec le développement du Newspace, les opportunités ne manquent pas et grâce à l’expérience AMICal Sat, il est bien armé. "Un projet comme ça, associant la science, l’ingénierie et la pédagogie, je ne pouvais le vivre qu’au CSUG" assure-t-il ravi d’avoir participé à cette aventure et déjà prêt à relever le défi suivant.


Extrait du magazine (H)auteurs - Numéro 7 - Eté 2019