Pourquoi l'océan à Grenoble ? #3 - La modélisation numérique des océans
Publié par Echosciences Grenoble, le 24 juillet 2024 730
De prime abord, on ne pense pas aux océans quand on parle de Grenoble. Les vagues, la houle, les courants, les ports... bref tout ce qui pourrait parler des océans nous semble bien loin . Pourtant, pour cette thématique nationale de la fête de la science 2024, nous avons réussi à dénicher des acteur·ices des sciences et de la culture scientifique et technique liés à ces grands bleus. Retrouvez-les dans notre mini-série "Pourquoi l'océan à Grenoble ?".
La modélisation numérique des océans
Aujourd'hui, nous devons affronter des changements environnementaux mondiaux, qui soulèvent des questions sur les impacts du changement climatique et l’augmentation des événements extrêmes. L’océan et l’atmosphère, ainsi que les continents et les glaces, sont des éléments essentiels de la Terre. Pour mieux comprendre les impacts sur ceux-ci, il est crucial de mieux connaître le système océan-atmosphère.
Répondre aux nouveaux défis actuels nécessite de considérer des systèmes très complexes, où l’impact des activités humaines ne peut pas être négligé et où les problématiques font intervenir différentes échelles de temps et d’espace : micro-échelle (nuage, tornade, etc.), échelle synoptique (dépressions, anti-cyclones, courants océaniques, etc.), échelle intermédiaire dite méso-échelle...
Pour relever ces défis complexes, il est crucial de développer des méthodes mathématiques et numériques adaptées, en particulier pour modéliser les écoulements géophysiques.
Les écoulements géophysiques
Un écoulement géophysique désigne le mouvement des fluides naturels sur Terre, principalement dans l'atmosphère et les océans. Ces écoulements incluent des phénomènes tels que les courants océaniques, les vents, les marées, les vagues, les rivières, et les mouvements de l'air et de l'eau liés aux phénomènes météorologiques et climatiques. Ces mouvements sont influencés par des forces telles que la gravité, la rotation de la Terre (Force de Coriolis), et les variations de température et de salinité (1).
Mais les écoulements géophysiques ont des caractéristiques qui les rendent difficiles à modéliser ce qui demande le développement de méthodes mathématiques et numériques spécifiquement adaptées.
Les modèles numériques sont des outils essentiels pour comprendre les processus, simuler et prévoir les événements à différentes échelles spatiales et temporelles. Cela permet d’utiliser des modèles réduits, des méthodes multi-échelles et également la mise en place d’algorithmes adaptés au calcul haute performance.
Vous aurez surement compris que, contrairement à beaucoup d'autres domaines scientifiques, on ne peut quasiment pas réaliser d’expérimentations sur les grands systèmes environnementaux (atmosphère, océan, climat...). La simulation numérique est donc souvent l’outil principal pour étudier et anticiper les évolutions de ces systèmes.
Océanographes ou mathématiciens ? Focus sur deux équipes de recherches grenobloises
- Le Laboratoire Jean Kuntzmann
Le Laboratoire Jean Kuntzmann (LJK) a été créé en 1951 par Jean Kuntzmann (1912-1992), un mathématicien français également fondateur de l'École nationale supérieure d'informatique et de mathématiques appliquées de Grenoble (ENSIMAG) en 1960, et de l'Institut de Mathématiques Appliquées de Grenoble (IMAG) de Grenoble.
Aujourd'hui, le LJK est une unité mixte de recherche (UMR), commune à l’Université Grenoble Alpes (UGA), au CNRS, à Grenoble INP et à Inria (UMR 5224). Il est constitué de trois départements de recherche en mathématiques appliquées et informatique. Le LJK héberge MaiMoSiNE, la maison de la modélisation du bassin Grenoblois. Ce partenariat est multidisciplinaire car permet de rejoindre des équipes académiques et industrielles dans le domaine des mathématiques et de la modélisation au niveau régional.
L’une des 6 équipes du département AMAC (Algorithmes, Modèles, Analyse et Calcul) est AIRSEA. Ses objectifs sont de développer des méthodes mathématiques et informatiques pour la modélisation des écoulements océaniques et atmosphériques, elle fait des réductions de modèles, de la gestion des incertitudes et des calculs hautes performances. Pour y parvenir, les outils mathématiques utilisés reposent à la fois sur des approches déterministes et statistiques. Les domaines d’application vont de la modélisation du climat à l’étude des événements extrêmes.
- Équipe MEOM de l'Institut des Géosciences de l'Environnement (IGE)
L'IGE est un laboratoire public de recherche en Sciences de la Planète et de l’Environnement, né le 1er janvier 2017. C'est aussi une UMR (commune au CNRS, l’UGA, l'INRAE, l'IRD et à Grenoble-INP), et il est l'un des principaux laboratoires de l’Observatoire des Sciences de l’Univers de Grenoble (OSUG). L’IGE se concentre sur les recherches climatiques, l'impact humain sur la planète, et les risques environnementaux, surtout dans les régions polaires, tropicales et de montagne, où ces enjeux sont critiques.
L'une des ses 9 équipes est l’équipe MEOM (Modélisation des écoulements océaniques multiéchelles) étudie comment l’océan influence le climat, développe des méthodes numériques pour analyser et prévoir l'environnement marin, et soutient l’océanographie spatiale. Depuis plus de 40 ans, MEOM améliore ses compétences technique en océanographie numérique, en particulier en développant des méthodes pour traiter et intégrer les données océaniques, des outils de modélisation, et en réalisant des simulations frontière sur des architectures de calcul haute performance.
Ce laboratoire de recherche Grenoblois, axe ses activités sur :
- Les interactions d'échelle dans l'océan
- Les interactions entre la dynamique océanique et les autres composantes du système climatique
- L'assimilation des données, interprétation des observations, conception de réseaux d'observation
Du côté de la Fête de la science...
Chaque année, les régions désignent un.e ambassadeur.ice pour porter la voix de la Fête de la science. Cette année, l'ambassadeur nous vient de Grenoble, et plus précisément du laboratoire Jean Kutzmann équipe AIRSEA !
Eric Blayo est enseignant-chercheur en mathématiques appliquées à l’Université Grenoble Alpes, directeur adjoint du Laboratoire Jean Kuntzmann (LJK) et membre de l'équipe AIRSEA au LJK et à Inria. Dans son interview, il nous raconte les liens entre les mathématique et l'informatique lorsqu'il s'agit des océans.
Accompagné de l'océanographe Emmanuel Cosme (IGE - CNRS / INRAE / IRD / UGA) et de la doctorante en glaciologie Tifenn Le Bris (IGE), il explorera les dynamiques des calottes glaciaires et des courants océaniques et décryptera les modèles mathématiques de prédiction de l’océan et de l’atmosphère lors de la conférence inaugurale de la Fête de la science "Glace, rivière et océan : de la goutte d’eau aux modèles", le jeudi 3 octobre à 18h30 à la Maison Grenoble Montagne pour tous savoir sur la modélisation numériques !
Article écrit par Chloé Ettouati
Sources
(1) Fluides, Automatiques et Systèmes Thermiques (FAST) - CNRS, Université Paris-Saclay
INRIA - AIRSEA