Grandir en humanité
Publié par Jean Claude Serres, le 21 avril 2016 3.8k
A propos de la diversité culturelle et du fait culturel en lui-même comme vecteur d’humanisation de chaque personne, cet article est une contribution personnelle à la préparation du quatrième Forum des lucioles : Grandir enfance culture citoyenneté. Ces propos n’engagent que l’auteur.
Je
participe aux activités de plusieurs associations, mouvement ou tiers lieux qui
chacun à sa façon investi les champs du culturel, de la diversité culturelle,
de la politique culturelle des droits culturels vis-à-vis des adultes comme des
enfants. C’est un domaine immense juxtaposant de multiples « entre
soi », frontières et perspectives de développement et générant de
multiples confrontations aux décisions politiques essentiellement dans les
choix et coupes budgétaires en ces temps de disette de subventions.
Les
divers champs d’expertises se confrontent, se dénigrent ou coopèrent suivant les
enjeux du moment dans la grande tradition de la confrontation démocratique
radicale française. Comment y voir clair et pour quel bénéfice ? Comment
rendre accessible au plus grand nombre la problématique globale de l’évolution
du fait culturel sans tomber dans les querelles partisanes des minorités
actives et le langage trop ciblé des experts ?
« Grandir
en humanité » comme « grandir en citoyenneté » résultent de la
rencontre de chacun avec les autres dans le cadre de communautés de destins et
de communautés de territoires qui embrassent le fait culturel et l’inscription
dans une multi culturalité et dans une diversité de cultures toujours en
mouvement, toujours en devenir. Le fait culturel est à prendre dans son
ensemble car il fait système : culture politique/citoyenne - culture
scientifique/philosophique - culture religieuse/spirituelle - culture
artistique/symbolique.
Chaque
domaine culturel est confronté à l’interaction entre la culture académique des
experts, la culture industrielle des masses, la pratique amateur des
passionnées et la pratique contestataire des laissés pour compte. C’est la
prise en compte simultanée de ces quatre grands domaines qui permet de grandir
en citoyenneté de façon cohérente. Ces quatre grands domaines partagent des risques
communs (menaces et opportunités) dans leurs évolutions singulières :
- La capacité de développement des communautés de destin assurant la diversité culturelle
- La capacité de vivre ensemble et de métissage culturel des communautés de territoires
- Les menaces de dérives communautaristes et de prise de pouvoir non démocratique de minorités actives
- La résilience nécessaire pour faire face à l’intégration rapide de flux migratoires intra et inter territoires importants.
En racine de cette réflexion la culture du risque c'est-à-dire la capacité de prise de risque (menaces et opportunités) volontaire. Pourtant le risque fait partie du vivant et du développement. Seule la peur gouverne la majorité des pensées et des actions, hors la peur est mauvaise conseillère. Ne pas confondre peur et vigilance ! La politique culturelle française fait exception par rapport aux autres nations dans cette peur des dérives communautaristes. Au nom de cette peur excessive, fondé mais paralysante l’état et les communautés territoriales imposent une politique culturelle intégrative mettant à mal la capacité de résilience, le métissage culturel et la diversité culturelle. A cela s’ajoute le fait que ces mêmes instances décisionnaires ne disposent plus des budgets de fonctionnement de ces politiques volontaristes. Enfin dans un état de droit, ce n’est pas la loi qui fait évoluer les pratiques mais bien le contraire ce sont les évolutions des pratiques sociétales relayées pour le meilleur et pour le pire par les minorités actives qui font évoluer le droit, par la jurisprudence ou par la violence.
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