Vingt siècles d’histoire dans la pierre
Publié par Claire Aranega, le 23 avril 2012 4.6k
Site patrimonial majeur, l’ancienne église Saint-Laurent devenue Musée archéologique Grenoble Saint-Laurent a rouvert ses portes au public le 6 mai 2011.
Au cœur de l’un des plus anciens quartiers de la ville, le Musée archéologique Grenoble Saint-Laurent dévoile les vestiges de la nécropole depuis le Ve siècle jusqu’à l’église moderne, témoins de l’histoire urbaine, religieuse et humaine de Grenoble. Le site doit sa renommée à l’exceptionnelle crypte Saint-Oyand, l’un des rares et précieux vestiges du haut Moyen Âge en France.
Son existence est révélée au XIXe siècle par Jacques-Joseph Champollion-Figeac, frère du célèbre égyptologue. Prosper Mérimée, inspecteur général des Monuments Historiques, rédige cinq rapports sur la crypte qui aboutissent à son classement en 1850.
De 1978 à 1995, une campagne de fouilles systématiques est menée sous la direction de Renée Colardelle. Ce travail de recherche a permis de mettre en évidence la remarquable continuité d’occupation du site. L’histoire et l’évolution architecturale des différents monuments religieux qui se sont succédés ici sont aujourd’hui clairement identifiées.
Les grands repères historiques du site
Au IVe siècle, se développe l’une des plus importantes nécropoles de Grenoble sur la rive droite de l’Isère. A Saint-Laurent sont alors construits huit mausolées, édifices funéraires destinés aux familles gallo-romaines les plus fortunées. Alors que Gratianopolis accueille ses premiers évêques, un grand mausolée de trois niveaux voit le jour avant 450. Il abrite les dépouilles des plus prestigieux personnages religieux de la ville et semble donc être l’amorce d’une église de pèlerinage. Des groupes de chrétiens viennent se recueillir sur leurs tombes.
Au VIe siècle, ce mausolée sert de base à la construction d’une grande église funéraire cruciforme. La liturgie évolue et les tombes se regroupent au plus près des reliques de ces illustres personnages. L’église cruciforme, construite sur deux niveaux, marque la naissance de la crypte Saint-Oyand. Puis une nouvelle église plus vaste, qui englobe les bâtiments préexistants, est construite sous la dynastie des Carolingiens.
En 1012, l’évêque de Grenoble Humbert d’Albon, cède Saint-Laurent aux moines bénédictins de Saint-Chaffre-en-Velay. L’église devient le siège d’un prieuré et les moines modifient son architecture au milieu du XIIe siècle. Elle adopte le style roman et prend l’allure que nous lui connaissons aujourd’hui.
Si le prieuré connaît son apogée au XIIIe siècle, l’époque moderne n’est guère favorable à Saint-Laurent et le service monastique est supprimé officiellement en 1683. L’église paroissiale perdure jusqu’à sa désaffection en 1980.
De la fouille au musée, les nouveaux projets du MAG
Riche de toutes ces connaissances archéologiques, le musée commence une nouvelle vie sous la direction de Jean-Pascal Jospin, conservateur en chef. Différents événements (spectacles de théâtre, danse, exposition de sculpture…) sont programmés pour 2012.
Inscrit dans la vie du quartier Saint-Laurent, le musée travaille à de futures collaborations avec le CCSTI. Une exposition commune est prévue en 2014, qui traitera des méthodes scientifiques de l’anthropologie. En effet, une partie des 1500 tombes fouillées à Saint-Laurent est en cours d’étude par plusieurs anthropologues. Ces études permettent notamment d’évaluer l’âge du décès, le sexe, de cerner l’état sanitaire et le comportement alimentaire des individus. De beaux projets en perspective pour ce site qui est encore loin d’avoir livré tous ses secrets…
>> Illustrations : Conseil général de l’Isère, coll. MAG. Auteurs : Franck Crispin (crypte) et Frédérick Pattou (autres)