Paxitech : piles à hydrogène pour nomades connectés

Publié par Marion Sabourdy, le 24 février 2014   9.3k

Leader européen dans le domaine des piles à hydrogène compactes, l’entreprise Paxitech, à Echirolles, s’inspire du mode de vie nomade des grenoblois et se tourne vers les jeunes.

Quand on va visiter une entreprise de piles à combustible comme Paxitech, à l’espace Comboire d’Echirolles, on ne s’attend pas forcément à discuter de la SaintéLyon. Et pourtant, dès l’entrée dans les locaux, on ne peut pas louper le mannequin équipé du dossard de la célèbre course régionale. Sportifs, les salariés de Paxitech le sont sans aucun doute. Mais ils ont surtout participé à cette course, plusieurs fois et en équipe, afin de vérifier le fonctionnement des piles à hydrogène de leur société.

Petit retour 10 ans en arrière, à la naissance de Paxitech. Il s’agissait alors d’une start-up issue du CEA et créée par Renaut Mosdale. Dès cette époque, de nombreux clients s’intéressaient aux piles à combustible, et notamment au cœur de ces piles, leur « matière première » : les membranes électrodes, des polymères sur lesquels sont imprimées une anode et une cathode et qui produisent de l’électricité. Ce fut le premier produit conçu par l’entreprise, qui a très vite élargi ses activités vers la conception de piles à combustible entières, Renaut Mosdale ayant déposé un brevet sur un format de pile planaire (en un seul plan et donc plus compacte). Ces piles très simples, alimentées par de l’hydrogène, peuvent à leur tour alimenter directement en électricité des appareils simples comme des drones ou des capteurs. Enfin, le troisième produit proposé par la société est une pile à hydrogène équipée d’un chargeur USB pour alimenter des appareils mobiles (smartphone, GPS, caméra embarquée, tablette, etc.). Une petite bouteille d’hydrogène ultralégère, d’un litre maximum,  alimente la pile et permet une autonomie d’environ 20 heures.

Vidéo de présentation de l'entreprise :

Petite mais costaude

C’est ce dernier type de pile que les membres de la société ont testé lors de la SaintéLyon. L’entreprise Raidlight, dont nous avons déjà parlé ici, leur a même conçu spécialement un sac à dos et une sacoche pour pouvoir ranger la pile et la petite bouteille qui l’accompagne (d’hydrogène, pas de Chartreuse !). L’ensemble est branché aux toutes dernières lampes frontales Petzl et a fonctionné sans perte de puissance pendant toute la durée de la course. La pile fonctionne d’ailleurs sans problème jusqu’à -30°C et l’équipe est d’ores et déjà partante pour la tester lors de courses nocturnes en ski de fond ou de randonnées en marche nordique dans les massifs environnants. L’occasion de la faire tester aussi par des guides de montagne.

Alexandre Ronez responsable marketing-commercial de Paxitech

C’est d’ailleurs vers le secteur de l’outdoor et du nomadisme que Paxitech souhaite s’orienter pour ses piles à hydrogène (1), afin de permettre aux personnes qui se déplacent d’avoir avec elles une source d’énergie portable entre 10 et 500 watts autre que les classiques piles, batteries ou groupes électrogènes, souvent trop lourds et pas adaptés à une grande variété d’appareils. Et des nomades, on en connait beaucoup à Grenoble : cyclistes, randonneurs, skieurs, spéléologues, parfois des groupes en sortie pendant quelques jours et qui ont besoin de s’éclairer ou de brancher leurs appareils électriques… Alexandre Ronez, responsable marketing-commercial de Paxitech évoque également « les personnes qui travaillent "off grid", c'est-à-dire hors du réseau d’électricité, avec des outils qui en ont besoin. Les artisans, comme un paysagiste par exemple, ne travaillent presque plus en filaire, le solaire ne marche que quand il fait beau et les batteries sont trop lourdes, elles coûtent cher et si elles ne sont pas utilisées, elles se dégradent. Je pense aussi aux pompiers, aux urgentistes, aux militaires, etc. ».

Renaut Mosdale reçoit le prix 2013 ARTINOV catégorie Procédé de production des mains de Georges Bruba sous les yeux de Jérôme Safar

Face aux solutions trop lourdes ou polluantes, les piles à hydrogène de Paxitech se veulent plus attrayantes car légères, peu polluantes et silencieuses. « Elles se dégradent bien moins que les piles classiques car elles ne "stockent" pas l’électricité. Elles la produisent à la demande à partir de l’hydrogène de la bouteille et ce, avec la même intensité, de la première à la dernière goutte ». Avec ses 600 000 euros de chiffre d’affaires, la société est d’ailleurs l’acteur principal de ces piles au niveau européen. La dernière version des piles « prêtes à l’emploi » avec leur port USB sera en vente cette année. Les membranes électrodes dont nous parlions plus tôt sont déjà vendues à plus d’une centaine de pays et « nous travaillons déjà à l’évolution du chargeur USB ».

Comprendre les avantages de l’hydrogène

En parallèle de cette activité, Paxitech propose également un kit pédagogique (lire la fiche) à destination des collégiens, lycéens et étudiants pour « créer de l’hydrogène par électrolyse de l’eau, démontrer les usages de l’hydrogène, la notion de puissance et de rendement électrique et réaliser des expériences sur l’incidence de l’électricité sur les composants électroniques » explique Alexandre. Dans une de ses expositions permanentes, le Palais de la Découverte utilise d’ailleurs des piles provenant de Paxitech.

Quelques éléments du kit pédagogique

« L’hydrogène sera bientôt notre quotidien. Pour l’instant, il s’agit d’un marché de niche, car les besoins sont très spécifiques mais ceux-ci augmentent, sans qu’on puisse bien gérer la distribution et encore moins le stockage de l’électricité. Les appareils connectés sont de plus en plus nombreux, performants et… gourmands ! ». La région Rhône-Alpes l’a bien compris, qui rassemble tous les acteurs de la filière hydrogène, comme Symbio FCell (l’hydrogène dans le transport) ou McPhy (stockage d’hydrogène sous forme solide). « Arnaud Montebourg souhaite que la filière française devienne leader européen ». Dans cet état d’esprit, Paxitech a créé le réseau FRHYSBI ("French hydrogen small business initiative") pour promouvoir les acteurs de l’hydrogène de l’hexagone auprès des étrangers. Et la petite bouteille d’hydrogène qui équipe la pile Paxitech, la « HyCan » est également une création commune avec McPhy et Ad-Venta. Une histoire d’énergie, et de réseau…

>> Note :

  1. Les autres secteurs des piles à hydrogène étant le « stationnaire » (tout système qui ne peut pas bouger comme des gros groupes électrogènes qui alimentent en électricité des maisons, des data centers ou des hôpitaux) et la « mobilité » (automobile, avion, chariots élévateurs, etc.)

>> Illustrations : Marion Sabourdy & Paxitech